CARL CRAIG

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Bien qu’originaire de Detroit, le légendaire producteur Carl Craig a toujours un peu fait bande à part vis-à-vis de ses célèbres confrères mais son apport créatif ultra-personnel à la house music depuis les milieu des années 90 reste indéniable, surtout depuis le succès de « Throw » sous le nom de Paperclip People en 1994. Questions / réponses sur le pouce, debout, les pieds dans le sable cannois des Plages Électroniques.

Tu as commencé en 1991 en utilisant ton propre nom, pourquoi par la suite avoir eu autant de noms d’emprunt ?

Je suis Gémeaux. Je suis né le même jour que Sun Ra et nous, les Gémeaux, on a ce genre de diversité dans tout ce que l’on fait, c’est pourquoi j’ai toujours fait des trucs différents, que ce soit Paperclip People, 69 ou autre…

Tu les vois comme des entités différentes ?

Ouais.

Genre ton nom BFC, ça voulait dire quoi ? Ou Paperclip People ?

BFC, c’est pour Betty Ford Clinic, c’est là où vont tous les alcoolos. Paperclip People, c’est juste un truc barré !

Tu sembles faire un peu cavalier seul par rapport au reste de la clique de Detroit comme The Belleville Three ou Underground Resistance. Tu as déjà été impliqué avec eux ?

Oui, bien sûr, moi et Mike Banks on joue en concert de temps en temps…

Oui mais sur disque, est-ce que ça a toujours été un choix délibéré de ne pas les rejoindre ? Est-ce qu’ils t’y ont invité ?

Non, on a chacun notre propre truc.

Tu es très reconnu pour la créativité de tes remixes. Comment les approches-tu ?

J’approche un remix comme j’approche mes propres morceaux. Un remix, pour moi, c’est mon disque. Alors, que je remixe Incognito, Pet Shop Boys ou autre, au bout du compte, c’est mon disque, c’est toujours mon truc à moi. Du coup, c’est important parce que quand on vient me dire « j’adore ton remix » ou « je déteste ton remix », c’est moi !

Y a t-il un processus spécifique que tu suis ?

Je me décris comme un échantillonneur. Peut-être plus qu’un producteur, je suis un échantillonneur. Et si je devais sampler Beyoncé, je le retournerais de sorte à ce qu’on pense que c’est Carl Craig. Donc c’est pareil pour les remixes, je prends un truc et je le retourne.

Il y a énormément de spontanéité dans tes morceaux. Est-ce que tu les enregistres en plusieurs prises et tu choisis la meilleure ?

Mon procédé change avec les années… Quand j’ai démarré, je faisais tout en live direct sur DAT, et ensuite quand tu as un multipiste, tu fais tout sur multipiste. Et maintenant, c’est encore un autre procédé.

Récemment, tu as fait des collaborations avec Moritz Von Oswald ou Green Velvet, avec quel artiste aimerais-tu travailler idéalement ?

Je dis toujours ça: ceux avec qui je veux travailler, la plupart sont morts.

C’est une nouvelle direction pour toi les collaborations ?

J’en ai toujours fait. Je veux dire, j’ai commencé à faire de la musique avec Derrick May [sous le nom de Incogdo – ndlr.], il y avait donc une collaboration au tout début.
Je me sens le plus confortable quand je travaille seul mais j’aime toujours ces moments parce qu’il y a quelque chose que Moritz [Von Oswald] peut faire auquel je ne penserais jamais, pareil pour Francesco Tristano, Niko Marks, Herbie Hancock, Marcus Belgrave ou Wendell Harrison, il y a quelque chose que tous ces gars ont fait auquel je ne penserais jamais [Carl Craig a déjà collaboré avec chacun d’entre eux – ndlr.].

Et du coup, tu comptes relancer le Innerzone Orchestra ?

Pour le moment, le prochain projet, c’est Versus – le truc symphonique. Donc, je finis cet album maintenant et ensuite on verra ce qui suit.

Qu’en est-il des re-edits sortis sur Moxie ? Tu les as tous réalisés ?

[fait semblant de ne pas comprendre la question, je la répète, continue à faire semblant de ne pas comprendre puis me regarde fixement]
Je ne sais rien à ce sujet.

As-tu des instruments fétiches que tu utilises régulièrement ?

Bien sûr, bien sûr, j’adore tous les processeurs d’effets. J’adore mon Pultec ou mon Tube-Tech, j’adore tous les trucs qui ne font pas de musique. Ça accentue la musique. Je ne peux pas dire que j’ai un clavier préféré, je n’en ai pas. Je n’ai pas de boîte à rythmes préférée, mais j’ai des processeurs d’effets préférés.

Qu’est-ce que tu écoutes en-dehors de l’électronique ?

J’ai toujours adoré la musique d’ascenseur. La samba genre « The Girl From Ipanema », Dionne Warwick, tous ces trucs que j’aime depuis que je suis gosse tout autant que ce que j’aime les trucs lourds, électroniques, dingues et suicidaires, tu vois, de Suicide, de Goblin, de Kraftwerk, de Liaisons Dangereuses, j’adore ces trucs… et puis j’aime cette musique vraiment douce et légère aussi. L’une comme l’autre.

Depuis une douzaine d’années, tu sors constamment de moins en moins de musique. Est-ce que tu as des centres d’intérêt extérieurs qui ont pris le dessus ?

J’adore cuisiner.

Comment gères-tu tes acouphènes avec ta profession ?

J’ai des acouphènes depuis que je suis gosse. Les acouphènes, c’est un seuil. Quand tu règles un compresseur, il y a un seuil pour qu’il fonctionne; et ce seuil, quand il passe au-dessus ou en-dessous, tu le jauges. Alors, quand j’entends le bruit blanc ou le bruit rose que j’entends maintenant, je dois entendre au-delà. La meilleure chose à laquelle je peux le comparer, c’est quand tu conduis, que tu as un pare-brise sale, tu dois arriver à voir entre la saleté. C’est la même chose avec l’ouïe, il faut pouvoir entendre entre la saleté.

 

Derniers remixes en date: Pet Shop Boys, Dinamo Azari, Fit Siegel + Tim Love Lee (2016).

Propos recueillis le 5 Août 2016 aux Plages Electroniques – Cannes (06).

 

Christopher Mathieu

 

Le 10/09 au Rockstore – Montpellier (34)

 

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