Arthur H célèbre ses 25 ans de carrière avec un superbe album « Soleil Dedans » et un recueil de 17 disques « Mouvement Perpétuel ». La créativité exacerbée d’Arthur H nous emmène dans un univers sonore et émotionnel, sans limite. Les textes, loin des banalités habituelles de la bande FM, nous transportent dans un espace intersidéral merveilleux où le désir de partager un voyage coloré, nous remplit d’énergie et de lumière.
« Soleil Dedans » est le titre de votre dernier album. Pourquoi faites vous souvent référence aux éléments dans vos chansons : la lune, les étoiles, l’eau, la terre…?
En fait, j’aurais voulu être météorologue. Mais mon père ne voulait pas. Il m’a obligé à être musicien, du coup je n’ai pas pu faire mes études de météorologie mais j’essaie quand même de parler de la météo et du ciel (rires). Après, c’est vrai que j’ai un tempérament très « cosmiquement » correct. Et je trouve que ce sont des images qui parlent à notre subconscient et qui sont très régénératrices.
Nous avons l’habitude de vous entendre dans un registre de voix plutôt grave, ce n’est pas forcément le cas dans « Soleil Dedans ». Est-ce un choix délibéré ou bien cela s’est fait de manière spontanée?
Non, c’est un accident. C’est une opération qui a mal tourné. J’ai dû subir une ablation des testicules. Et du coup, ma voix a monté de deux octaves (rires).
Une partie de « Soleil Dedans » a été réalisée au Canada. Y a t-il un rapport entre l’album et ce pays?
En fait, oui ! Il y a surtout Montréal, plus que le Canada. Il y a cette espèce de sensation, qui peut être illusoire, mais qui est réelle: une sensation où tout est possible. Il y a beaucoup de musiciens incroyables, où tout le monde a de la place. J’étais très lié à Patrick Watson, à Lhasa et à tous les musiciens qui gravitent autour. Donc, comme je me sens toujours très libre à Montréal, je me suis dit que si je faisais un disque avec tous mes amis de longue date, peut-être que j’accèderai à plus de liberté. C’était ça le désir.
Fin 2015, vous avez sorti une intégrale, “Mouvement Perpétuel” qui regroupe 17 disques. Y a t-il un titre qui pourrait résumer ce coffret?
(Rires) En fait, j’espère que non parce que j’aime la variété. J’aime quand il y a plein d’atmosphères différentes. Dans l’intégrale, il y a des choses très avant-gardistes, très groovy, très atmosphériques. Donc, que ce soit dans les concerts ou dans les disques, j’essaie de me mettre dans une forme de voyage et de partir à l’aventure. J’essaie de m’y perdre, d’y emmener les gens et de les perdre aussi. Tout cela demande beaucoup de paysages différents, de la surprise, de l’inconnu. Donc heureusement, il n’y a pas de titre pouvant résumer ce qui fait cette aventure.
Comment définiriez-vous votre processus de création? Les mots précèdent-ils la mélodie ?
Il n’y a pas vraiment de règles. C’est vrai que ça peut tout d’un coup partir d’un mot, d’une phrase et derrière se cache une chanson. Mais, aujourd’hui, je dois dire que ça part plutôt de la musique. Sur mon ordinateur, j’ai des centaines d’idées de musique. Celles qui me plaisent vraiment surnagent, résistent… Et, à un moment je les travaille et, tout simplement, des mots apparaissent. Puis, derrière les mots, il y a une histoire qui arrive. C’est toujours assez mystérieux comme processus.
Quelque soit le thème, aussi grave soit-il, il y a toujours, soit la musique, soit le texte, qui paraissent inviter à l’émerveillement. Diriez-vous, comme moi, que le merveilleux est omniprésent dans votre œuvre?
Pour moi, les chansons, c’est un peu comme le cinéma. Elles doivent proposer un monde qui vibre un peu plus fort que celui du quotidien, du normatif. Ce monde doit, tout simplement, donner plus d’énergie. Sa nécessité est de donner une énergie supérieure, momentanée, mais qui révèle notre désir, qui nous inspire des idées, des résolutions, une envie de se dépasser… Le cinéma et la musique me communiquent tout cela. Je n’ai donc pas envie de parler du quotidien dans ses banalités, j’ai envie effectivement d’être dans un rêve. Même si le rêve a toujours ses racines dans ce que l’on vit, il n’est pas du tout déconnecté de la réalité, au contraire, c’est une émanation condensée de notre réel.
Lorsque nous assistons à l’un de vos concerts, nous semblons comme plongé dans un conte. Le conte en est-il une source d’inspiration?
Le conte, mais plus généralement les histoires. Effectivement, je considère que le normatif nous emprisonne ou, du moins, nous limite. Donc, à un moment, il faut délibérément rentrer dans le monde des couleurs, des sons, de l’énergie, de la lumière, dans quelque chose qui vibre. Les images et les histoires servent à tout cela.
Comment se passe votre tournée?
La tournée est un processus très intéressant car ça change tout le temps. A la fois, on prend beaucoup d’assurance de par la répétition, et en même temps cette assurance repose sur une forme de changement, d’adaptation perpétuelle. Ce qui est passionnant est de constater que nous sommes très différent humainement et artistiquement, au début et à la fin de la tournée. C’est quelque chose qui nous transforme. C’est la vertu de faire et de refaire les choses, avec la fatigue et la lassitude qui vont avec, mais qui donne un résultat final où il y a une espèce d’osmose avec le groupe. Nous respirons, nous improvisons ensemble, nous sommes liés télépathiquement. Cela fait qu’on peut embarquer les gens et les emmener beaucoup plus loin. C’est vraiment la vertu de jouer tout le temps.
Pouvez-vous nous parler des musiciens qui vous accompagnent?
Oui! Il y a Florent Savigny à la batterie, Antoine Montgaudon à la guitare, Juan De Guillebon à la basse et Pierre-Luc Jamain au clavier. Ils ont tous aussi leurs propres morceaux, leur propre groupe. Se sont tous des créateurs. Je suis très fier de ce groupe. Je les aime beaucoup. Comme je disais précédemment, ce qui est important, c’est de respirer ensemble.
Vous pouvez autant faire des lectures intimistes dans des librairies, que des concerts devant une salle comble. Cela montre t-il une certaine humilité ou une façon particulière de gérer votre notoriété?
Pour moi, il n’y a pas trop de différences : je peux raconter une histoire avec du rock très chaotique, très explosif ou je peux raconter une histoire avec de la poésie, devant peu de personnes. Pour moi, peu importe, du moment que l’on raconte une belle histoire.
Si vous deviez partir avec un seul film, un seul livre et un seul album vous choisiriez lesquels?
Le film ce serait « Le Gendarme et les Extraterrestres », parce que si j’étais vraiment tout seul, j’aurais sérieusement besoin de rire. Le livre, ce serait « Martine Au Cirque », parce que je serais souvent triste et j’aurais besoin de me rappeler les merveilles de mon enfance, ce moment où j’étais très protégé. Et le disque, ce serait « Silence » de John Cage, comme ça je pourrais écouter un vrai morceau de silence. Ca me changerait les idées (rires).
Quel est le musicien ou chanteur avec qui vous aimeriez collaborer ?
Ce serait Björk. J’aimerais que Björk m’écoute et trouve que la musique d’Arthur H est extraordinaire et veuille absolument faire un duo avec lui. Je serais très heureux de recevoir ce coup de fil…
Beth Gibbons?
Ah oui aussi, avec Beth Gibbons ce serait fantastique. Elle a une voix vraiment merveilleuse…
Stéphane Grandin
Le 05/02 au Quattro – Gap (05), le 06/03 au Train Théâtre – Portes Les Valences (26), le 25/03 à La Croisées Des Arts – Saint Maximin (83).
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