Du 07 au 09/07/23 sur la presqu’île du Gaou – Six-Fours-les-Plages (83).
Septième édition, septième succès.
Années après années, Le Pointu Festival prend le 14 juillet à contre-pied en proposant un véritable feu d’artifice d’émotions au cœur d’un site dont l’originalité n’a d’égal que le charme. L’affiche, savamment orchestrée, entremêle cadors confirmés et outsiders affirmés, offrant trois jours d’une programmation explosive, à la fois surprenante et à la pointe de l’Indé.
Véritable défibrillateur musical, le Pointu Festival ne manque jamais de rassurer et d’encourager les festivaliers à faire confiance au line-up sélectionné.
18000 festivaliers, une affluence et une notoriété en hausse pour ce qui reste, plus que jamais, considéré par les fans comme l’incontournable rendez-vous de ce début de période estivale, un festival qui demeure à taille et à valeur indéniablement humaines.
Le Pointu, c’est également une organisation ultra réactive et on ne peut plus à l’écoute des remarques et critiques immédiatement exprimées sur les réseaux sociaux. En effet, deux problèmes logistiques allaient, durant la journée du vendredi, provoquer un allongement des files d’attente. Dans un premier temps, aux points d’approvisionnement en jetons, lesquels n’avaient pas été prévus en quantité suffisante, puis aux bars où deux tireuses à bière tombèrent en panne. Dès le lendemain matin, l’ensemble des dérangements étaient corrigés, avec, en plus, des bénévoles supplémentaires appelés en renfort (NDLR : un grand bravo à ceux qui, durant toute la première journée, durent essuyer les plâtres des dysfonctionnements, dans des conditions difficiles, ne quittant le site que tôt le matin et revenant dès l’ouverture du festival le samedi. Sans vous, la fête ne serait pas possible). L’accueil bienveillant de l’ensemble des équipes, assurant le bon déroulement du festival, permit aux festivaliers de se concentrer pleinement sur les prestations offertes par des groupes visiblement ravis d’être présents.
Nouveauté cette année, l’espace de la Pinède, arrière-cour alternative à la scène principale de La Plage, habituellement réservée aux possesseurs d’un pass proposé en quantité limitée, était ouvert à tout le monde. Si on ne peut que louer une volonté manifeste de la part de la direction d’offrir à chacun la possibilité d’accéder à l’ensemble des shows programmés sur les deux espaces, prolongeant par la même l’expérience immersive, on regrettera malgré tout une temporisation chevauchante des concerts, les groupes jouant systématiquement de manière simultanée sur une partie de leurs prestations.
Cette année encore, l’intégralité des groupes, ayant foulé les planches des deux scènes dressées entre terre et mer, mérite d’être mentionnée, tant la qualité des concerts trouve sa place dans le panthéon de la grande gastronomie artistique.
Avec une ouverture des portes à 18 h 30 précise, précision mécanique qui n’allait pas faire défaut un seul des trois jours, le week-end démarra baignant dans une chaleur qui, elle aussi, allait accompagner la presqu’île du Gaou tout le long du weekend.
Vendredi, sur la scène de La Plage, ce sont les Anglais du groupe post-punk grunge Sorry qui ouvrent le bal, suivis des californiens de Frankie and the Witch Fingers et leur rock garage. La soirée se finira dans la poésie pop teintée de sonorité country des américains de Kurt Vile & the Violators suivie d’une splendide conclusion signée The Brian Jonestown Massacre durant laquelle, Anton Newcombe et Joel Gion nous plongèrent dans une faille temporelle ramenant nos âmes au San Francisco des années 90. Un délice de rock psychédélique et shoegazien.
Côté scène Pinède, on alterna les ambiances énervées et calmes avec les Marseillais de Avee Mana, les texans de Mamalarky et les Irlandais de Lankum.
Samedi, la première surprise du jour survient avec la chanteuse anglaise Tor Maries qui, sous le nom de Billy Nomates, interprète ses chansons, seule sur scène, créant un lien immédiat avec le public. S’ensuivent les formations Meatbodies, énième projet garage punk stoner du prolifique artiste californien Chad Ubovich (NDLR : notamment Fuzz aux côtés de Ty Segall), et Kevin Morby, poète américain jouant un rock-folk enivrant. La soirée se termine sur la prestation sans limites du groupe suédois Viagra Boys, un délire post-punk-disco électriquement maîtrisé sous des riffs de basse hypnotisant, un must.
La Pinède voit se succéder le DJ Jul Giaco, les tourangeaux de Meule et leur set explosif, deux batteurs, un synthé-bassiste, une tuerie réellement, puis Kingsley Hall et son groupe Benefits, une colère anglaise contenue dans une musique brutale mêlant noise et indus.
Dimanche et, malheureusement, dernière ligne droite vers un soleil couchant de clôture. Mais avant ça… Un après-midi de fou ! Les Britanniques de BDRMM (NDLR : prononcé Bedroom) distillent une dream pop saupoudrée de shoegaze et de coldwave, une tendance qui va être immédiatement contrecarrée par les new-yorkais de A Place To Bury Strangers (NDLR : APTBS pour les fans), emportés par l’imprévisible Oliver Ackermann, chanteur guitariste et véritable ingénieur du son, créateur des pédales de la marque Death By Audio. Le groupe exécute quelques titres noise-rock et psychédélique avant qu’Oliver décide de commencer à utiliser une guitare en guise de médiator. À partir de cet instant, tout ne fut que féérie. Guitares expédiées dans les airs, confiées à Sandra à la batterie, ampli utilisé également comme médiator, avant de se jeter dans le public, tout le groupe et leurs instruments. La fin du show prend place au milieu de la foule, les trois musiciens submergés par un public slammant littéralement sur le trio.
Un retour au calme avec le rap de Loyle Carner, un moment de flottaison avant le concert final, un set parfait du londonien qui parvient, sans aucune difficulté, à unir les festivaliers présents en nombre pour célébrer la tombée de la nuit… Et, quelle nuit… Idles… Tête d’affiche incontestée et très attendue. Les cinq membres du groupe de Bristol, Angleterre, créé par le chanteur Joe Talbot et le bassiste Adam Devonshire, vont, dès la première seconde, enflammer Le Pointu Festival. Chaque seconde, chaque chanson, chaque mot du chanteur, provoquent la transe du public. Le concert est généreux, musclé et dévastateur. Tous les titres phares du groupe sont interprétés. Idles est chez eux et jouent sans complexe, avec une dextérité musicale sans pareil. Un punk paradoxalement très technique.
La Pinède s’éclaire, durant ce temps, des prestations des Français de Parade et leur post-punk, de Mss Frnce et leur punk énervé aux chansons ultra-explosives de 37s, pour finir avec Lysistrata (NDLR : dont le nom signifie « celle qui défait les armées »), trio incontournable de la scène française indie-rock avec un show post-hardcore cinglant.
Des surprises, un cadre idyllique, une organisation exemplaire malgré les difficultés rencontrées, une affiche à couper le souffle et un public comblé. La recette de la réussite existe bel et bien. Si les instants de bonheur passent toujours trop vite, Le Pointu festival est un éclair. Il est toujours périlleux de réussir à remercier l’ensemble des protagonistes d’un tel événement sans en oublier certains. C’est donc avec une chaleureuse gratitude générale que nous exprimons notre impatience de revenir déguster les instants magiques du Pointu Festival en 2024.
Aurélie Kula
© Aurélie Kula