TOKO BLAZE

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Voilà maintenant trente ans qu’il fait partie du paysage musical marseillais. Toko Blaze, c’est à la fois l’âge d’or du hip-hop, l’enfant des sound-systems et l’amour du reggae. Nous avons discuté avec l’artiste.

Quand et comment t’est venue l’envie de faire de la musique ?

Au départ pour moi, la musique vient de la danse. Déjà tout jeune, j’aimais beaucoup danser en soirée, et j’aime la culture hip-hop et les trois disciplines qu’elle mêle : graff, danse et djing. Je ne viens pas d’une famille de musiciens, mais j’ai toujours baigné dans cet environnement.

Justement, en parlant de hip-hop, tu as connu l’âge d’or du rap français, tu as collaboré avec beaucoup d’artistes qui faisaient partie du paysage du rap français dans les années 90. Quels souvenirs gardes-tu de cette époque ?

J’étais tout jeune : c’est l’insouciance. Tu fais les choses sans calculer ce qui va se passer derrière. Tu es happé par la passion, tu ne fais pas gaffe à ce qu’il se passe autour ! Nous avons démarré, nous étions une poignée, on a fait un bout de route ensemble et en se retournant, on a vu qu’il y avait du monde. Nous n’avions pas de plan de carrière. Au départ le hip-hop était vraiment une musique de niche, du réseau alternatif, auquel on s’est greffés pour pouvoir jouer et progresser.

Parmi les rencontres importantes que tu as faites, il y a le Massilia Sound System, quelles sont les relations qui vous lient ?

Elles sont familiales ! C’est grâce à eux que je suis arrivé jusque là. C’est eux qui m’ont donné le micro et la passion d’écrire, de monter sur scène, d’échanger. J’ai grandi dans la dynamique du Massilia. Ils sont comme des tuteurs artistiques.

Dans ta carrière, il y a un virage net vers le reggae dans les années 2000. Pourquoi ?

Disons qu’il y a toujours eu cette souche reggae dans mes projets. Le fait de côtoyer le Massilia Sound System a joué, évidemment. Nous étions plongés dans le milieu des sound system reggae, et le virage s’est fait naturellement. Je ne me suis pas trop posé de question. Je ne fais pas personnellement de distinction entre rap et reggae. Avec les rappeurs, nous avons commencé ensemble, que ce soit avec la Fonky Family ou 3e Oeil. Ils ont explosé par la suite, et nous sommes toujours heureux de nous retrouver. Nous faisons partie du même monde.

Tu t’es souvent émancipé des frontières artistiques, tu t’es même essayé au punk-rock à une époque. Comment définirais-tu tes influences musicales ?

Même si la trame reste hip-hop reggae, mes goûts sont larges. Ma musique se nourrit de mes rencontres et échanges, sans barrières, en cassant les cloisons et en m’amusant. Je n’ai pas envie de rentrer dans des choses trop codifiées. Pour ce qui est de ce que j’aime écouter, je suis très musiques latines en ce moment, musiques africaines, aussi, ainsi que les musiques de fusion comme l’électro hip-hop. Ce sont des périodes ! Avant, tu devais aller chercher dans les bacs exactement ce qui te convenait, en étant limité par tes finances. Maintenant, avec les plateformes, ça ne s’arrête jamais !

Tu as sorti un projet en 2023, “Toko Blaze Meets FXXL”, dans lequel tu évoques beaucoup les problèmes politiques de la ville. Est-ce que ce sont des sujets que tu as à cœur de traiter dans ton nouvel album ? 

Je suis plus mâture en vieillissant. J’ai plus d’expérience donc je suis moins engagé dans ces sujets. Je prends du recul et je fais passer les messages sous une autre forme. J’essaye néanmoins d’affiner ma plume et mon écriture pour exprimer les choses différemment.

L’écrit, au-delà des paroles de chansons, semble t’intéresser de plus en plus. Qu’apprécies-tu dans cet exercice ?

J’ai toujours écrit des poèmes, des trucs, même si j’étais très moyen en français à l’école (rires). J’ai développé cette activité en me lançant dans le rap. Je n’ai pas la parole facile, je suis assez introverti, et pouvoir passer par l’écrit puis l’oral m’a aidé à évacuer, c’est une sorte d’échappatoire.

Dans ton nouvel album – “Drôle d’oiseau” – tu t’amuses à nouveau à mêler les arts ; les morceaux sont clipés comme des courts métrages et chacun semble être une petite histoire… Qui sont ces “drôles d’oiseaux” ?

Exactement ! J’invente des personnages à travers lesquels je parle de la vie de tous les jours, des différences. J’observe les vies qui m’entourent et je retranscris en musique des histoires. Les drôles d’oiseaux, ce sont tous les anciens qui m’ont inspiré, tous les oiseaux de nuit de la Plaine, ceux qui nous ont quitté ou qui sont encore là, et qui ont alimenté ma carrière musicale et artistique. C’est un pont entre monde artistique et monde de la nuit.

Sur cet opus, tu as collaboré avec plusieurs artistes que tu suis depuis longtemps…

Oui ! Bien sûr, il y a Gari Grèu, qui a supervisé tout l’album. Nous avons travaillé sur l’écriture des textes et l’enregistrement des maquettes et pré maquettes. Il a géré le suivi de la production du disque et il a aussi participé au morceau “À la folie”. J’ai aussi invité Lionel Achenza, le chanteur du groupe Raspigaous, sur l’album. Tous les trois, nous avons monté une formule scénique qui s’appelle Oai Reggae Party : un sound system nomade où nous partageons la scène et le micro et proposons un moment convivial. C’est un projet qui fonctionne bien.

Lucie Ponthieux Bertram 

Le 30/11/2024 à Galette Records et à l’Intermédiaire – Marseille (13).

tokoblaze.net

Photo : Olivier Martino.

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