THEO LAWRENCE

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THEO LAWRENCE

#NVmagZoom

Theo Lawrence a réussi à concilier le blues fiévreux des bayous avec le rock cajun pimenté de soul sixties. Après son succès « Heaven To Me » qui l’a révélé au public, il nous livre dans son dernier opus “Sauce Piquante” un vibrant hommage à la musique populaire américaine. 12 titres qui resteront longtemps inscrits dans nos mémoires, confirmant le talent du jeune prodige. Une rencontre en toute sobriété et élégance.

 

Comment s’est fait le choix d’une musique soul plutôt qu’une musique électro ?  

C’est la musique que j’écoute et pratique depuis tout petit, c’est un coup de foudre que j’ai eu avec la guitare, au début je faisais du piano. J’ai jamais été branché musique électronique, machines, j’ai toujours aimé faire de la musique à plusieurs plutôt que tout seul. Au cœur de cette musique folk, country et soul, c’est la symbiose de plusieurs musiciens, je n’ai pas l’impression que cela se retrouve dans l’électro. C’est naturel dans la mesure où je fais ça depuis bien longtemps.

 

Quelles sont les influences qui ont bercé ton adolescence, et depuis orientent ton parcours ? 

J’ai commencé avec le rock des années 60, Les Stones, Beatles, les Stooges, les groupes américains et anglais. Et en m’intéressant aux influences de ces artistes, j’ai découvert la soul et dans cet univers, je me suis rendu compte que beaucoup de songwriters provenaient de la country. Il y a aussi une racine issue du blues, je me suis plongé là dedans et mon intérêt s’est élargi à la musique populaire américaine des années 20 aux 70’s. Il y a beaucoup de choses qui me plaisent, j’essaie de condenser tout cela personnellement, et d’avoir mon propre son. Quand on a accès à toute cette musique, c’est difficile de se cantonner uniquement à un style. J’essaie de synthétiser tout ce que j’ai pu écouter.

 

Comment s’est passée ta collaboration avec le producteur Mark Neill des Black Keys ? A-t-elle influencé ce nouveau virage musical ? 

Il y a beaucoup de choses dans sa méthode d’enregistrement, dans son fonctionnement qui ont fait que je voulais enregistrer chez lui, et aussi la musique qu’il affectionne. Il sait produire et arranger ces sonorités qui me correspondent, c’est un art qui se perd, les gens réputés pour cela à ma connaissance se comptent sur les doigts de deux mains. On a enregistré en Géorgie (USA) dans son studio avec un nouveau line-up, dans un endroit inconnu. Cela fait déjà bientôt deux ans qu’on a enregistré, c’était un challenge. Les compositions sont dans un nouvel esprit, on ne les avait pas joués sur scène, on les avait abordés en répétition.

 

J’avais regardé les sessions live à Toerag, il y a une restitution vraiment incroyable, les prises de son sont très réussies…

Les sessions de Toerag datent d’un an après le disque, on a eu le temps d’apprivoiser les titres, les faire sonner plus live, et différemment de l’album. Cela explique cette démarche spontanée, l’enregistrement de “sauce piquante” est plus instantané. Dans le disque sorti pour le Disquaire Day, “Plus de Sauce”, il y a un titre issu de ces sessions et un titre inédit enregistré au Texas.

 

Le fait d’être bilingue, facilite-t-il le travail d’écriture ? 

Je ne suis pas bilingue à 100 %, l’anglais n’est pas ma langue natale, c’est une langue que je pratique depuis longtemps au travers du cinéma, des livres et de la musique. Je n’ai pas vécu dans un pays anglophone, mais je suis à l’aise pour écrire des textes, pour développer des thématiques entrant en résonance avec les idées que je cherche à exprimer. Je ne me suis pas senti frustré de ne pas pouvoir exprimer ce que je ressentais, vu que parfois tu as accès à moins de vocabulaire, ça t’oblige finalement à aller plus à l’essentiel, de ne pas s’éparpiller.

 

Il y a une certaine mélancolie dans ce disque, tout comme une sonorité dépouillée d’artifices, est ce pour toi la manière la plus directe d’exprimer ta musique ? 

J’aurais aimé que l’album soit encore plus dépouillé car plus je joue avec mon groupe et plus je cherche à aller à l’essentiel. Quand tu démarres la musique, tu as tendance à en faire beaucoup, pour camoufler certains défauts. Plus tu avances, plus tu simplifies ta musique. J’ai encore du chemin à parcourir dans ce sens, mon but est d’exprimer le plus directement ce ressenti. Il y a beaucoup de disques des années 60 que j’adore dont la production est virtuose et chargée, pour arriver à faire cela de manière digeste, c’est un apprentissage, un processus qui permet d’apprendre les uns des autres en évitant de se marcher les uns sur les autres.

 

Chaque chanson de ton dernier disque semble être une carte postale que tu envoies à ton auditoire. Considères-tu que la musique et le voyage sont indissociables ? 

Le voyage mental c’est cela que j’aime, en écoutant les artistes que j’aime, ça évoque souvent bien plus que la musique elle même, c’est un voyage qui convoque une atmosphère, une ambiance plutôt qu’une technique ou une virtuosité, oui cette notion de voyage est indissociable de la musique, c’est cela que je ressens vraiment.  Justement, je regardais le clip de “Prairie Fire” qui a été tourné en Corée, je trouve l’idée ingénieuse, ce côté inattendu du lieu.  A la base, ce n’était pas prévu, le clip n’est pas une forme d’expression dans laquelle je m’épanouis pleinement. Là, il se trouve qu’avec mon ami Neville qui est très talentueux, lors d’une tournée en Corée avec The Hearts, on s’est mis à faire des films, à tourner des séquences, le montage a donné un clip qui n’était pas prévu ni réfléchi, tout s’est fait sur le moment. Tant mieux si cela donne une impression réussie.

 

Quels sont tes projets pour la suite, au vu de la tournée qui a été reportée ? 

On vient de rentrer d’une tournée en Suède de trois semaines, on a été chanceux de pouvoir jouer par les temps qui courent. L’accueil en Suède a vraiment été génial, on a pu vivre comme avant, là-bas il y a peu de restrictions, on a eu l’impression de vivre comme avant. Le public ne nous connaissait pas et nous nous sommes découverts mutuellement. On a une dizaine de dates reportées en france, courant 2021, parallèlement on a enregistré de nouvelles compositions plus live que jamais, des sessions directes.

 

Ton précédent album a été encensé par la presse, et son succès immédiat, est-ce volontaire de ta part de t’être éloigné du format proprement commercial ? 

Je me suis pas dit que j’allais faire quelque chose de vendeur, mais plutôt une musique qui ressemble à ce que j’ai envie de faire. Auparavant, c’était inconsciemment que je faisais certaines concessions, dans une volonté de minutie, de travail soigné. J’avais envie de me rapprocher de la musique que j’aime, et aller dans ce sens là, dans une démarche totalement indépendante. Les prochains disques seront toujours en dehors des modes, à l’encontre des courants commerciaux, ce sera vraiment un pari risqué de faire un prochain disque hors de tout label.

Franck Irle 

 

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