SÉBASTIEN TELLIER

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Du surprenant « L’Incroyable Vérité », au sémillant « Politics », en passant par l’érotico-pornographique « Sexuality », le grandiloquent « God is blue », et le sublime « Aventura » retour sur le parcours du caméléon de la pop française qui ne se fond absolument pas dans le paysage.

 

Les premiers pas

Fils d’un guitariste rythmique, Sébastien Tellier a grandi dans le monde de la musique, enfant il laissera courir ses doigts sur guitare en plastique, batterie et clavier. C’est le long de la côte atlantique que le futur trublion de la pop française ressent ses premiers émois musicaux, et se met à rêver à ses premières mélodies.

Monté à la capitale, c’est sur le label Record Makers qu’il fait ses armes. L’album « Incroyables Vérités » révèle le talent brut et sa patte inimitable. Sébastien Tellier a déjà l’art de faire du beau avec du kitch, lui seul arrive à nous faire croire à ce que l’on ne pouvait imaginer possible, peut être grâce à sa candeur infantile, où tous les rêves les plus fous sont permis et à sa sincérité. Il s’installe alors dans le paysage musical français comme la relève d’Air , dont il assurera la première partie aux cotés de Pamelia Kurstin, magicienne du thérémine. C’est le début de tout pour le futur gourou du dieu bleu. Ses morceaux à la fois lunaires et mélancoliques n’échappent pas à l’oreille avertie de la réalisatrice Sophia Coppola qui choisit le titre « Fantino » pour faire partie de la bande originale de son film « Lost in translation ». Ce nouveau fait d’arme ne fait qu’accentuer la comparaison avec Air qui avait signé la B.O du précédent film de la réalisatrice « Virgin Suicide ».

 

Ritournelle et compagnie

2004, c’est l’heure du succès pour Sébastien Tellier avec son album « Politics », encensé par la critique, mais surtout avec son titre « La Ritournelle » entêtante mélodie pianotée, qui une fois entrée dans votre tête ne risque pas d’en sortir. La rencontre avec le public se fait, et la magie opère, particulièrement à l’étranger où le côté décalé de l’artiste, sa « french touch » et ses concerts, qu’il a le don de transformer en évènements, font recette ; il ira même jusqu’à remplir des Zéniths à Houston au Texas. S’il commence à être connu du grand public, son talent pour les mélodies et les plages instrumentales envoûtantes n’échappe pas non plus aux professionnels, la même année il signera l’intégralité de la bande originale du film « Narco ».

Ce ne sont là que ses débuts au cinéma, deux ans plus tard (2006), il compose la musique du film décalé « Steak », réalisé par son ami et musicien Mr Oizo, dans lequel il se permet même une apparition. La même année il choisit de faire subir un grand lifting acoustique à ses deux précédents albums. En quelques jours il enregistre « Sessions » renommé « Universe » pour l’international.

 

Consécration Sexuelle

Deux ans passent et avec la régularité d’un métronome le dandy de la pop française sort « Sexuality « , album aussi lubrique que brillant, en compagnie de Guy-Manuel de Homem-Christo (l’un des Daft Punk). Succession de scénettes érotico-pornographiques, Sébastien Tellier ne s’y livre pas moins comme dans la sublime « L’Amour Et La Violence ». C’est pourtant la chanson « Divine », dont les paroles en anglais feront scandale, qui sera retenue pour représenter la France à l’eurovision, plaçant ainsi son auteur au cœur de l’actualité.

Encore deux ans s’écoulent et l’homme à la barbe décide de proposer une réinterprétation de « Sexuality » et pour se faire, s’entoure de tout ce que l’électro fait de meilleur : Boys Noize, Breakbot, Moulines, A-Tral, Aeroplane, Sebastian, Kavinsky et bien d’autres encore. L’album est une réussite et reste ce recueil de chansons salaces pourtant tellement douces à l’oreille. Mais surtout, malgré ces collaborations prestigieuses l’album reste celui de Tellier. Chaque chanson porte sa marque et sa voix à la fois suave, sournoise et perverse vous guide d’un titre à l’autre, les glissant au creux de votre oreille.

Le sémillant Chabal de la musique française est au sommet, il domine de la tête et des épaule le monde de la pop française et ne semble pourtant pas prêt de s’arrêter, gagnant encore et toujours en popularité.

 

Débauche Bleutée

En 2012 vient alors le temps de « My God Is Blue » album intimiste et magistral, discret et grandiloquent, aussi sonore que visuel ! Tout est là, guitare et orgue se mêlent pour donner un album à contre-courant, anti-soupe radiophonique populaire et musique prédigérée prête à être avalée sans effort. « My God Is Blue » est un album qui se mérite, le gourou de « l’Alliance bleue » a confiance en l’intelligence du public et livre une grande messe qui nécessite une réelle écoute. Profond ,riche et intelligent l’album surprend encore une fois. Une surprise presque attendue tant le parcours de son auteur est semé de virages et de changements désarçonnants, semblant pourtant toujours nous mener dans la même direction.

Un an plus tard Sébastien Tellier descend de son nuage céleste et revient parmi les hommes avec « Confection », il enterre, aux cotés de Philipe Zdar, son passé de gourou et sa grandiloquence neurasthénique au profit de mélodies dénudées. L’album s’écoute d’un trait tant les chansons s’enchaînent et se répondent, la musique vous emprisonne et vous accompagne, le voyage est doux et pourtant jamais monotone. L’interlude mégalo est bel et bien fini, l’homme à la barbe ne se cache plus.

 

La maturité quandide

Quelques mois s’écoulent et vient « L’Aventura » dernier album de l’éternel Peter Pan de la pop française. Avec ce dernier opus tout se confirme, « Confection » était déjà un premier pas vers la lumière, mais dans « L’Aventura » c’est bel et bien lui qu’il place au cœur de l’intrigue de cet album, à la fois envoûtant, déroutant, plein de soleil, de candeur et de maturité. Né d’une rêverie à l’arrière d’un taxi, sur fond de psyché brésilienne, le gourou de « l’Alliance bleue » sait alors où il veut aller, les accords chauds, complexes et profonds de la musique brésilienne le portent, il se découvre… Par delà la musique, c’est avant tout la voix et les textes qui frappent, aucune chanson en anglais, celui que l’on connait avant tout pour sa musique place ses textes au même niveau. Aucune rivalité entre mots et mélodies, les deux se jaugent, s’apprivoisent, s’épousent, se sublimant l’un l’autre… On pourrait parler de l’album de la maturité tant on a l’impression que Sébastien Tellier s’y est trouvé, cependant ce qu’il nous livre de lui n’est que candeur, douceur et émerveillement. Celui qui, il y a encore peu, endossait le rôle d’un dieu nous revient dans le plus simple appareil. À quarante ans la comète de la pop française et son âme d’éternel enfant n’ont pas fini de nous laisser la tête dans les étoiles.

 

Hugo Pascual

Le 30/10 au Paloma – Nîmes (30) et les 31/10 à l ‘Espace Julien – Marseille (13)

www.sebastientellier.com

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