“Ocean Of Days”, le nouvel EP du trio indie folk confirme tout le bien que l’on pensait de ce groupe à l’identité affirmée et qui poursuit un parcours musical revendiquant tout à la fois le goût d’une esthétique néo-romantique, de voix marquantes et de l’importance des mélodies. Gonflés à bloc grâce à un single que Rolling Stone a placé dans sa playlist hebdomadaire, Hervé, Mathieu et Julien ont accepté de répondre aux questions de Nouvelle Vague.
Pourquoi cette formule à trois, sans basse, ni vraie batterie ?
Hervé : En fait au départ le principe c’est : “pas de cymbales et pas de basse” ! C’est un concept qui est venu assez naturellement. Avec Julien on écrivait chacun pour nos groupes respectifs et on s’est dit qu’on allait voir ce que ça allait donner. Et il y a eu une vraie alchimie. Puis on a eu l’opportunité de faire la 1ère partie de Temperance Movement et il a fallu monter une formule live en un mois. C’est là que Matthieu est arrivé. On voulait conserver une formule originale et très vite est venue cette idée d’une scission entre musique folk et côté “triba” au sens très percussif. Puis la contrainte a permis la créativité.
Mathieu : une contrainte matérielle forte puisqu’en plus on avait une place très restreinte sur la scène pour ce concert de toute façon !
Jullien : on avait dans les contraintes de départ l’idée de mettre les voix en avant, parce qu’on était tous les deux chanteurs lead. On voulait aussi mettre les harmonies en avant et avoir ce côté groupe, mais dans une formation qui ne serait pas “classique” pour éviter l’écueil du power trio guitare / basse / batterie.
Vous allez encore plus loin dans le concept puisque “Ocean of Days” est plus dans l’épure que votre 1er EP et ses arrangements de cordes, non ?
Hervé : on a fait les choses un peu à l’envers. C’est-à-dire qu’on a fait les chansons telles qu’on les jouait en live. Et ensuite on a eu après l’opportunité de placer des cordes avec une violoniste de talent. Vu qu’on a proposé ça à la fin, ça a ajouté une fraîcheur et une excitation qui ont relancé l’enregistrement. Pour le 2ème on est parti sur une base différente puisqu’on a chacun écrit des choses de notre côté, et on a partagé ces bribes de chanson quand on se rencontrait. Ça a donné une autre texture. Il y avait ce côté plus épuré, l’idée de se rapprocher de ce que moi j’appelle de la new wave, même si c’est pas de la new wave au sens où on l’entend en général. Il y a des textures de clavier plus présentes et on a des morceaux plus aérés, là où le 1er EP était plus dense.
En même temps, et c’est ça qui est intéressant, on reconnaît votre son, votre identité musicale
Hervé : l’identité se fait de nature, par la formule, le trio, le concept.
Julien : et les voix puisqu’on se partage les lead avec Hervé. Et on avait encore une fois l’envie de mettre nos deux voix plus à égalité dans les chœurs. C’est pour ça que quand Hervé chante en lead, on m’entend vraiment bien derrière dans le mix. Et inversement. Et Bobby qui ajoute la sienne pour les chœurs, une cerise sur le gâteau !
Et pour les paroles, comment ça se passe ? Chacun écrit pour son morceau ?
Hervé : en général, le chant lead écrit le texte qu’il va interpréter. Parce que c’est plus aisé de chanter quelque chose que tu vas incarner ! Pour pouvoir s’imprégner d’un univers dans l’interprétation.
Julien : un peu comme Lennon et McCartney ! (Rires) En même temps, on se complète vraiment. Regarde, moi ce que j’aime bien avec le 1er EP, c’est qu’on ne se rappelle plus qui a apporté quoi. C’était plus un patchwork qu’avec “Ocean of Days”.
Les inspirations justement : Arcade Fire par exemple, est-ce que c’est flatteur ou gênant ?
Julien : moi je les ai découverts après avoir enregistré, grâce à Hervé ! Je n’arrivais pas à entrer dedans, mais il m’a conseillé des morceaux qui m’ont mis une claque. Donc oui, c’est évident, ils ont été tellement importants. J’écoute Sigur RÒs, il y a eu aussi avec Dove, tout un ensemble de groupes qui ont amené des Coldplay et plein de choses comme ça.
Hervé : Arcade Fire, ils ont réussi à amener des éléments d’enregistrement, de structure, d’arrangements qui ont été tellement repris qu’ils sont devenus des classiques. Pour moi c’est un groupe beaucoup plus précurseur que ce qu’il n’y paraît. Il y a aussi REM.
Et ce qui reste à la fin, ce sont quand même des morceaux qu’on imagine autant repris en chœur dans des stades que joués simplement à la guitare acoustique !
Mathieu : c’est ça le truc, il faut que la chanson marche avec rien.
Hervé : le principe de base c’est essayer d’avoir une belle structure pour pouvoir, comme tu disais, la jouer seul avec une guitare. Et avec January Sons on n’a pas eu peur de se confronter avec des chansons un peu “fleuves”, au sens populaire, avec des refrains, des chœurs, enrobées et en même temps ce côté “indé” qu’on veut garder. Malgré tout, ce n’est pas évident de se confronter à ça, parce que la limite est très mince avec le côté commercial, très pompeux, U2 quoi, mais c’est nous. Arcade Fire et REM en sont pour moi les parfaits exemples, ils réussissent à avoir une intégrité artistique tout en proposant quelque chose qui soit accessible à tout le monde.
Laurent Bruguerolle