Il faut bien l’admettre, si l’univers de YouTube propose un contenu éclectique, il n’en demeure pas moins une nébuleuse médiatique au sein de laquelle, de temps en temps scintille une nouvelle étoile. Et dans la galaxie des musiciens, Florent Garcia, jeune guitar hero en devenir, se déplace à la vitesse du son. Du conservatoire au web il n’y a qu’un pas et Florent a su enjamber la barrière les séparant avec brio. Décortiquant la musique des plus grands, note par note, Florent vulgarise la théorie et la pratique sur sa chaîne Youtube éponyme. C’est à l’occasion de la sortie de son second EP “Cocktail” que le talentueux guitariste s’est livré au jeu des confessions.
Quel est ton premier souvenir lié à la musique ?
Waouh ! Ça remonte loin (rires). J’ai le souvenir, au sein de mon enfance, d’une guitare, un jouet qui m’avait été offert par mes parents. Sur le corps de la guitare il y avait des petits boutons qui, une fois pressés, faisaient retentir des mélodies pré-enregistrées. Je me rappelle en avoir joué énormément. D’ici à affirmer que cet objet a influencé mon attrait pour l’instrument, je ne sais pas, mais c’est définitivement un jouet sur lequel j’ai passé beaucoup de temps. On peut considérer cette guitare comme étant mon premier contact enfantin avec la musique.
Est-il exact que tu n’avais que six ans lorsque tu as débuté la musique ?
C’est tout à fait vrai. J’ai commencé le conservatoire à l’âge de six ans. Ce fut tout d’abord le solfège au CP. Mais le solfège lié à la musique classique, celui qui est enseigné académiquement. On ne peut donc pas considérer que c’est à période qu’est né mon amour pour la musique (Rires). Est-ce le côté théorique et rigide de cette activité qui te rebutait ? C’est exactement cela oui, on peut affirmer que, pédagogiquement parlant, je n’étais pas très réceptif à leurs méthodes. Attention, je ne critique pas l’efficacité de celles-ci. Simplement, elles peuvent amener certaines personnes à s’éloigner de cet enseignement. C’est la raison pour laquelle, arrivé au collège, j’étais devenu assez grand pour expliquer que je souhaitais mettre fin à mes cours de musique.
Comment s’est alors négocié ton virage à la suite de cette décision ?
A cette époque, mon frère, qui a trois ans de plus que moi, s’était acheté des albums que je considère aujourd’hui comme étant des classiques. Des disques d’Iron Maiden, AC/DC, Metallica, etc…, auxquels venaient se mêler la nouvelle génération de groupes tels que Linkin Park et Sum 41. Je découvrais cela en même temps que lui. Ces sons étaient tellement différents de tout ce dont j’avais l’habitude d’entendre alors, c’était incroyable. J’entendais vraiment ce que je voulais faire avec la musique, j’adhérais totalement à ce style de compositions. Le côté ultra accessible du pop punk m’a donné envie de recommencer à zéro. S’en est alors suivi l’achat de ma première guitare électrique, une entrée de gamme pour laquelle j’ai cassé ma tirelire et utilisé toutes mes économies. Et j’ai tout réattaqué seul.
As-tu toujours voulu faire carrière dans la musique ?
C’est une question complexe. Oui et non en fait. Ma famille ne baignait, à l’époque, pas dans le milieu artistique. Je n’avais pas de contact, donc pas de porte d’entrée dans cette sphère. De plus, à douze ans, il t’est inconcevable qu’il soit possible de gagner de l’argent en étant artiste. La musique a toujours été ma passion et je la pratiquais continuellement ; malheureusement, j’entendais quotidiennement les gens me répéter que, oui, cela pouvait demeurer un hobby, mais qu’il me faudrait exercer un vrai métier en parallèle. Par la suite, j’ai joué la musique que je voulais faire entendre avec mes groupes lors de concerts, mais avec cette voix dans ma tête qui me répétait inlassablement “Trouve un métier normal au cas où”. De fait, j’ai donc suivi, à côté de cela, des études plus conventionnelles, mais, lors des stages en entreprises qui accompagnaient celle-ci, j’ai compris que je préférais galérer à faire ce que j’aimais sans en dégager beaucoup d’argent, plutôt que de finir par me flinguer en exerçant un poste au sein d’une banque ou de quelque chose comme ça.
Ta maîtrise musicale s’étend sur la pratique de plusieurs instruments, peux-tu nous préciser lesquels ?
Mon domaine de prédilection concerne la guitare et la basse. Après, lorsque tu décides de composer, d’arranger, tu te retrouves nécessairement dans l’obligation de t’intéresser à d’autres instruments tels que la batterie qui est, en ce qui me concerne, un outil qui devrait être utilisé par tout le monde tant celui-ci est accessible. Une partie de mon activité se trouvant être la production, je suis également amené à me servir fréquemment d’un clavier midi, qui, de fil en aiguille, finit par te faire t’asseoir devant un piano. Il est évident que je ne me considère pas comme étant du niveau d’un vrai pianiste, cela va de soi, mais je me débrouille. Ce qui est intéressant, quoi qu’il en soit, c’est de constater que, plus tu pratiques d’un instrument, et plus celui-ci va t’amener à ouvrir tes oreilles et donc ton jeu vers d’autres instruments. Plus tu t’ouvres à la voix d’un instrument, plus tu élargis le spectre de ta réceptivité musicale, et plus c’est aisé d’apprendre.
Si tu en as un, quel est ton style musical préféré ?
Je n’ai pas réellement de style favori. Bon maintenant, il est vrai que, souvent, ce que tu écoutes et apprécies lorsque tu es adolescent tend à devenir un peu la fondation de ton style. La mienne est clairement orientée rock-blues. En gros tout le spectre balayant la musique du blues au hard-rock & métal. Cette musique d’origine américaine qui, harmoniquement, ne se révèle pas nécessairement très riche mais très énergétique. Après, de cette fondation, découle toute une diversité d’autres styles à partir du moment où tu gardes l’esprit ouvert. Plus j’avance et plus je me diversifie. J’écoute énormément de hip hop, de néo soul, d’ambient, et, également, toute la scène néo-classique avec des artistes tels que Ólafur Arnalds et Nils Frahm. Tu peux toujours trouver quelque chose d’intéressant dans tout.
De fait, quels sont, d’après toi, les artistes ayant eu la plus grosse influence sur la musique en général ?
Je vais être complètement honnête, je ne pense pas avoir, à ce jour, de connaissance assez approfondie de la musique dans ce qu’elle a de caractère exhaustif pour prétendre avoir la légitimité de répondre à cette question. En revanche, dans le cadre de thématiques bien précises, j’ai, malgré tout, quelques opinions. Par exemple, concernant la scène guitare qui est plus de mon domaine de prédilection, je vais avoir tendance à citer Jimi Hendrix, qui, lui même, s’inspirait du blues de Robert Johnson. En parallèle de cela, je dois reconnaître qu’avec l’essor incroyable qu’a suivi la musique à partir de ces années-là, il est difficile de sortir tel ou tel artiste du lot. Les musiciens talentueux sont de plus en plus nombreux. Je considère, qu’aujourd’hui, les influences dans le monde la musique se font plus au niveau des mouvements qui interagissent entre eux.
Que retiens-tu de ton passage à l’Académie Rainier III ?
On peut diviser celui-ci en deux parties. Mon premier passage lorsque j’étais enfant, avec un apprentissage très scolaire du solfège au sein de la section classique du conservatoire, ne m’a pas réellement laissé de souvenir réjouissant. Même si j’admets utiliser encore aujourd’hui des notions de ce que j’avais appris à l’époque, je n’ai pas aimé la pédagogie qui y était appliquée à l’époque. Ce n’est pas ce premier passage qui m’a donné l’amour de la musique. Quelques années plus tard, après m’être acheté mes instruments et m’être auto-formé selon mes goûts, je me suis alors dit qu’il serait sympa de retourner au conservatoire mais, cette fois, en rejoignant le département jazz musique moderne. Là j’ai eu la chance d’y rencontrer Jean-Michel Aublette, qui y est d’ailleurs toujours professeur de batterie, un musicien incroyable qui jouait avec d’autres artistes extrêmement talentueux ! C’est à ce moment là que j’ai compris, en voyant les musiciens échanger entre eux, en opposition au classique ou tout semble figé et tracé, que c’était exactement ce que je voulais faire.
A force d’étudier et d’analyser les mouvements et surtout les artistes de chacun de ces domaines, n’y a-t-il pas un risque de perdre en originalité et en spontanéité de composition?
C’est une très bonne question car tu exprimes là le ressenti de beaucoup de personnes. Mais en fait pas du tout. Il faut bien comprendre, qu’à l’inverse d’une règle grammaticale par exemple, la musique tire son solfège du résultat. C’est parce qu’on a compris que telle ou telle formule marchait qu’on en a déduit les moyens d’y parvenir d’un point de vue théorique. Personnellement, j’écris énormément de manière instinctive. Comme je te l’ai expliqué, l’aspect classique de la composition ne me branche pas. Je le dis sans volonté de me mettre en valeur par rapport à des dogmes établis depuis longtemps mais bien tout simplement parce qu’il s’agit là d’un domaine dans lequel je ne suis pas bon. Je suis mauvais en dictée de notes. Je peux écrire des partitions, mais c’est ultra douloureux pour moi et très très long. Je travaille à l’oreille et je me force à avoir justement ce regard pragmatique sur mon travail. J’ai conscience, qu’avec ma chaîne YouTube, les gens me voient comme un analyste qui aborde la musique de manière un peu mathématique et scientifique. Mais c’est en fait pour moi la seule façon d’aborder la musique avec toute la rigueur que, personnellement, je n’arrive pas à avoir.
Penses-tu que l’on puisse être un bon chercheur, un bon professeur et un bon créateur à la fois ?
Tout à fait. En fait, j’irais même jusqu’à dire que beaucoup de grands musiciens le sont. Le premier exemple qui me vient instinctivement à l’esprit est Jacob Collier qui est l’un des artistes les plus pointus en termes d’harmonies, de techniques et de connaissances. Sa musique est incroyable et lorsqu’il effectue des master-class, il parvient à vulgariser avec facilité des concepts musicaux d’une grande complexité. On voit tout à fait qu’il s’agit d’un technicien qui a passé sa vie à relever des plans et à étudier les morceaux des artistes qu’il aimait. Je pense que tous les bons musiciens passent par cette phase d’analyse et d’approche des morceaux composés par les auteurs qu’ils apprécient et qui les influencent. Le seul point faible, par rapport au contenu de ta question, que peut rencontrer un bon musicien reste l’aspect pédagogue que tous n’ont pas puisqu’il s’agit là d’une qualité liée directement à la personnalité et non plus à la musique en elle-même.
Existe-t-il un morceau dont tu pourrais ne jamais te lasser ?
(Rires) Il y en a trop là! Je peux en citer plusieurs? J’organiserais alors ma réponse avec un classement par décennie. De Jimi Hendrix, “Crosstown Traffic”, tout l’album Led Zeppelin IV, d’ Aphex Twin le morceau “Avril 14th”. Il y a aussi le morceau “ Saman” d’ Ólafur Arnalds.
Et, maintenant, à l’inverse, quel est, d’après toi, le morceau le plus surcoté?
(Rires) C’est difficile une fois de plus. Tu vois j’ai publié une vidéo sur le morceau “Wonderwall” (NDLR : du groupe Oasis) et bien même une chanson comme celle-ci est super bien composée lorsque tu essaies de l’analyser un peu. Lorsque tu l’as entendue un million de fois à la fête de la musique tu n’en peux plus et pourtant c’est un morceau qui est hyper bien foutu. Après, j’avoue avoir peut-être plus de problèmes avec les trucs récents. Je pense à cette série “La Casa de Papel” qui a déclenché une espèce de déclinaison malsaine de la chanson “Bella Ciao” qu’on s’est tapée après. Une horreur avec des espèces d’afro-beats sans aucun sens. Hormis cela, je ne pense pas qu’il existe un seul morceau célèbre de rock qui ai eu un succès qu’il ne méritait pas.
Sur ton site, tu donnes des cours de musique. Depuis combien de temps fais-tu cela?
J’ai démarré mon activité en étant à la fois professeur, dans des écoles de musique, et musicien avec mon groupe pour donner des concerts. A la suite de cela, YouTube a commencé à vraiment fonctionner alors j’ai, dans un premier temps, lâché les cours pour en fin de compte ne les reprendre que pour un ou deux élèves avec qui je continue parce qu’ils sont, avant tout, devenus des amis. Mon activité concernant l’apprentissage est maintenant basée sur des méthodes que j’ai créées et que je vends en ligne car la demande est devenue telle que je n’ai plus le temps de m’y consacrer.
D’où t’es venue cette envie de créer une chaîne YouTube?
Et bien, justement, tout est parti des cours en fait. Je ne regarde jamais la télévision chez moi, tout ce que je visionne se trouve, entre autres, sur le support YouTube. Je regarde beaucoup et depuis longtemps les chaînes américaines. Je trouve leurs formats très très cool et on ne trouvait pas ce type d’émission en production française. Alors, quand j’ai compris que, quelque soit mon nombre d’étudiants, les questions émergeant au sein de chaque niveau finissaient par être toujours les mêmes, je me suis mis à me filmer avec une caméra afin de créer un genre de cours au ton léger. J’en ai réalisées deux ou trois que j’ai laissées de côté et puis il y a eu cette vidéo, traitant du fonctionnement de l’algorithme de YouTube, qui a commencé à bien marcher et qui m’a fait me dire, et bien ok, allons-y, voyons jusqu’à quel point les gens peuvent être intéressés. J’ai donc enchaîné avec des cours de guitare, tout en modifiant mon format au fur et à mesure.
As-tu déjà une idée de l’évolution à venir de ta chaîne?
Question complexe car je travaille toujours en flux tendu. J’ai du mal à me projeter car dans ce genre d’activité, tu es constamment entourés de personnes qui te disent que tu devrais faire comme ci ou comme ça car il va se passer ceci ou cela et en fait rien ne se passe jamais de la manière dont on te l’a prophétisé avant. J’essaie avant tout de faire ce qui me plaît. YouTube m’a surtout permis de croiser la route de beaucoup d’autres artistes. Il ne faut pas oublier que je suis un musicien avant d’être un Youtubeur. C’est un message qui est parfois dur à faire passer parce que les gens qui me connaissent maintenant m’ont découvert via YouTube. Donc en fait, je me consacre le plus possible à la musique et à tous les projets qui en découlent et je ne touche pas trop à ma chaîne qui continue sur sa lancée. Je comprends que c’est certainement une erreur de ma part de ne pas avoir de vraie stratégie à long terme pour ma chaîne, mais je préfère garder ce côté fait main à l’arrache sur le web tout en mettant l’accent et en me consacrant pleinement sur la musique en elle même.
Quels sont tes projets en parallèle de ta chaîne?
Je suis un gros amateur de la scène chill up production moderne dont un grand nombre de producteurs se trouvent être français. J’aime beaucoup m’impliquer dans ce créneau artistique. Je suis également en train de travailler sur la musique d’un téléfilm de Sam Karmann (NDLR : Émile le tueur dans « La Cité de la Peur »). Habitant à côté de Monaco, je participe aussi à la création de musique d’illustration dans le cadre de projets liés à la mer. De manière générale, j’interviens aussi dans la création musicale lorsque, par exemple, on me demande un solo de guitare à intégrer dans un morceau. Après, j’ai énormément d’autres idées de choses à mettre en place, mais c’est le temps qui me manque.
Quels sont les musiciens ou les youtubeurs avec qui tu aimerais partager l’écran?
Il y a énormément d’artistes et, de manière plus générale, de gens avec qui je m’entends bien. Concernant la musique, je regarde beaucoup de vidéos américaines donc les idées pourraient venir aussi de là-bas. Mais je me demande en fait s’il serait vraiment intéressant, en terme de collaboration, de faire une vidéo partagée avec d’autres musiciens qui partageraient les mêmes idées que moi. Tu vois je crois qu’à la limite, je préférerais faire un truc en commun avec, par exemple, des youtubeurs, dont les chaînes ne parlent pas, de prime abord, de musique mais qui, se révéleraient être fans de musique malgré tout.
Tu viens de sortir un nouvel EP, “Cocktail”, peux-tu nous en parler? En quoi diffère-t-il de “Lune” le précédent?
“Lune” a maintenant un an. C’est un EP de quatre titres, donc très court, et qui, dans son ensemble, est caractérisé par une ligne très chill up, très instrumentale avec, bien sûr, la guitare en instrument principal. J’ai sorti ce disque un peu sous la contrainte, les morceaux n’étaient pas finalisés et je partais en tournée. J’étais donc soumis à une date limite et je n’ai pas eu le temps de m’y consacrer autant que je l’aurais souhaité. “Lune” est un peu mon œuvre de frustration. En contrepartie, “Cocktail” a été conçu et a vu le jour à l’abri de toutes pressions. J’ai eu le temps d’utiliser Instagram pour tester mes idées, j’y laissais des échantillons de trente secondes environ, puis je les laissais mûrir et je revenais plus tard afin de tester à nouveau leur pertinence. Une fois mes quatre bases de morceaux définies, j’ai pu prendre tout mon temps pour les habiller et les mixer proprement. Il en ressort un enregistrement un peu moins ambiance, un peu plus puissant avec, notamment, des accents post-rock. Ce que j’ai réellement apprécié avec “Cocktail”, c’est le fait de pouvoir me dire que je me moquais du résultat en termes de réception et de chiffres, que seul le plaisir de jouer ma musique comptait.
Lors de tes phases de composition musicale, laisses-tu de la place pour un chant potentiel?
Non. J’aurais une démarche différente si je savais qu’un chant était à inclure. Ceci étant dit, mes morceaux n’étant pas ultra chargés, j’aurais tendance à répondre que, l’opération serait malgré tout possible. Mais j’écoute beaucoup de musique instrumentale, donc le fait qu’il n’y ai pas de chant ne me dérange absolument pas. Je rencontre souvent des gens qui me disent qu’ils trouvent dommage qu’il n’y ai pas de chanteur ou de chanteuse sur mes musiques. Je trouve que cela n’est absolument pas nécessaire. Après j’adorerais bosser avec un chanteur ou une chanteuse avec qui je m’entendrais bien. Mais pour la partie liée à ma composition solo je n’ai pas l’intention d’en rajouter.
Dans le cadre d’une tournée live, comment procéderais-tu? Seul ou bien avec d’autres musiciens?
C’est bien là tout le problème de mon style de musique. Elle est difficile à reproduire live en effet de par le fait que je sois seul. Il y a bien la solution de se faire escorter par un DJ set mais je ne suis pas fan. Le fait est que, lorsque je compose mes titres, il n’y a aucune ambition de les reproduire en live par la suite. Dans le cas inverse, j’aurais étudié des arrangements différents, histoire de rendre le tout plus jouable en groupe et en concert. Et puis, franchement, la situation sanitaire actuelle ne m’inspire pas du tout un retour prochain des groupes sur scène. Alors non, je fais comme s’il n’y avait pas de live tout simplement. Et pour être honnête, cela ne me dérange pas du tout car je me contente parfaitement de la vie en studio. J’aime jouer live, mais l’idée d’une tournée, pour le moment, ne m’inspire pas du tout. Le rythme des tournées, la fatigue, les contraintes, rien de tout cela ne me manque en fait.
Quelles sont les qualités que tu rechercherais chez d’autres musiciens dans le cadre de la création d’un groupe?
La première va paraître évidente mais déjà il faudrait que, humainement, cela se passe bien. Tu vois, avec mon expérience, j’ai vu beaucoup de musiciens interagir entre eux, et bien une chose me saute aux yeux, les groupes se forment sur des questions d’affinité et non pas de potentiel technique. Un musicien peut bien être d’un niveau incroyable, s’il subsiste une incompatibilité de caractère, tu ne le rappelleras pas. Tu choisiras sans hésiter le gars qui, joue un peu moins bien, mais est sympa avec toi, t’aide à ranger le matériel, etc… Bon, après, il faut reconnaître que, oui, l’aspect technique demeure un sujet de fond important. Tu ne peux pas non plus choisir un gars juste parce qu’il te fait rigoler. Mais vraiment j’insiste, l’aspect humain est au moins aussi important que l’aspect technique. Tu m’interrogeais sur les tournées et bien ne serait-ce que pour cela, vivre vingt-quatre heures sur vingt-quatre avec d’autres personnes dans un tour-bus, avec la fatigue et ton niveau de tolérance diminuant fortement au fil des semaines, si déjà au départ, il existe des tensions entre plusieurs personnes, ce n’est même pas la peine je crois.
YouTube a permis l’émergence de centaines de musiciens qui, sans ce média, seraient restés dans l’ombre. Considères-tu que YouTube a facilité une forme de compétition qui n’existaient pas avant son existence?
Je ne sais pas si on peut directement parler de compétition. L’ensemble du fonctionnement reste malgré tout méritocratique. Non en revanche, une chose est certaine, Youtube a permis de toucher beaucoup plus de gens que les tremplins locaux le faisaient jusqu’à maintenant. Maintenant c’est vrai aussi, qu’avec le temps, ça commence à devenir un petit peu dense. On sait que pour ceux qui sont là depuis longtemps, la question se pose moins que pour les nouveaux arrivants pour qui il est plus difficile de sortir du lot. Ce qui a été mon cas en somme, je suis arrivé tardivement sur YouTube. Après, si tu débarques avec un projet un peu singulier, cela joue également sur ta capacité à te démarquer. L’aspect compétition de YouTube est assez similaire à celui rencontré dans le monde de la musique quand on y réfléchit. Si un pote arrive à faire un solo mieux que toi, tu vas travailler plus pour atteindre au moins le même niveau. En ce sens, je parlerais plus de motivation que de compétition.
Tu te considères comme étant arrivé tardivement, pourtant ta chaîne existe depuis dix ans déjà.
Ma chaîne a dix ans, mais le format dans lequel je publie mes vidéos n’a que deux ou trois ans lui. Les premières années, je ne faisais que diffuser des vidéos ici et là, une par an, à l’occasion d’une reprise ou des choses comme ça. Rien de ce à quoi ma chaîne peut ressembler à présent avec son contenu produit régulièrement
Aurélie Kula