Chanteur du groupe de pop française MPL, Cédric Bouteiller a accepté de revenir sur les débuts du groupe en 2012 et sa belle évolution jusqu’à aujourd’hui, entre confidences, recette magique et recherche philosophique.
Je vous ai connus il y a huit ans à Paris sur une péniche sous le nom « Ma Pauvre Lucette », pourquoi l’avoir transformé en MPL ?
C’était un choix à la fois artistique et stratégique. Au départ, nous avons construit ce groupe autour du personnage de Lucette, que nous avons incarné dans de nombreux textes et histoires. Au fur et à mesure, c’est devenu enfermant, car le public nous demandait sans cesse « Mais qui est Lucette ? ». D’autre part, le premier nom faisait très « vieille France », chanson française à l’ancienne alors que nous voulions faire quelque chose de moderne donc notre nom ne nous permettait pas de bien nous identifier dans le milieu professionnel musical, c’est pourquoi nous sommes passés à l’acronyme.
Sur Internet, vous êtes dans la catégorie « chanson française » ou « pop française », cela vous convient ?
Il y a de nombreux tiroirs dans notre musique mais la base, c’est quand même la chanson car nous avons beaucoup de textes, d’histoires, un jeu de narration assez central. En revanche, les musiques vont puiser dans beaucoup de styles différents dont le rap et la world music mais le style prédominant reste la pop, c’est-à-dire (pour moi) un style léger qui cherche à faire danser et à divertir.
Avez-vous des influenceurs ou influenceuses au niveau musical ?
Nous n’avons jamais eu de grands maîtres de référence mais l’artiste auquel on s’identifie pour son ambiance de fête triste, de sujets sombres mais sur une musique entrainante, c’est Stromae. Dans les premiers albums, j’étais assez influencé par le parlé-scandé de Fauve, que nous avons beaucoup écouté mais avec les albums suivants, nous nous en éloignons de plus en plus car je suis davantage à la recherche des notes et des mélodies.
Comment procédez-vous pour la création de vos chansons ? Vous êtes le leader où tout le monde crée ?
MPL compte quatre musiciens : deux guitaristes, un bassiste et un percussionniste-comédien. Ce sont les deux guitaristes qui composent des instrumentales avec des lignes de guitare, des percus, du synthé et lorsque j’ai des idées de textes, je pioche dans leur banque de sons et associe texte et voix à leur musique. C’est donc d’abord une rencontre musique/texte puis si elle nous plait, nous nous posons pour en faire un morceau, de manière collective.
Auriez-vous des conseils pour les jeunes artistes/groupes qui aimeraient percer comme vous et pouvoir sortir de leur région ?
Je dirais aller chercher un public, de manière spontanée et volontaire, sans attendre que des gens nous aident à le faire. Par exemple, nous avons toujours sorti nos compositions et nos clips, sans qu’ils soient validés par des professionnels ; même s’ils n’étaient pas parfaits, ils étaient toujours faits avec le cœur. Aujourd’hui c’est beaucoup plus difficile lorsque nous voulons sortir quelque chose.
Vous avez aussi diffusé des vidéos délirantes – le gourou, Monsieur Lichen – quel est leur rôle ?
Oui, elles sont dues à la rencontre avec le cinquième membre du groupe, Arthur, devenu notre Monsieur Loyal puisqu’il fait les transitions entre les morceaux et transforme nos concerts en petites pièces de théâtre. Son personnage a évolué : au début, c’était un imposteur qui parlait tout le temps sur scène puis il est devenu notre Gourou et animait les rituels d’une grande cérémonie et maintenant, il est Monsieur Lichen, une incarnation de la nature bienveillante.
J’ai découvert la chanson très poétique et elliptique « Les oiseaux », alors que cherchez-vous et de quoi avez-vous peur ?
Avec le groupe, nous cherchons à écrire de bonnes chansons, c’est-à-dire des chansons qui vont procurer des émotions aux gens, les faire voyager, les aider à surmonter des étapes difficiles ou leur planter de petites graines. A titre personnel, je cherche la tranquillité, le calme, la paix et le temps libre. Le groupe a peur de devenir plus collègues de travail qu’amis mais ce n’est pas vraiment une peur, c’est un danger dont on a conscience. Moi, j’ai peur pour ma fille, ce qui peut lui arriver, maintenant que je suis papa. Et je me questionne beaucoup sur mon utilité, sur le sens éthique et social de mon métier. Je me sens très privilégié – en tant que garçon ayant des moyens et une famille qui le soutient – et j’aimerais pouvoir partager et rendre tous ces privilèges dont j’ai pu bénéficier.
Si tu devais donner l’essence de la philosophie musicale de MPL en trois mots, quels seraient-ils ?
Festive, mélancolique et éclectique.
Loreleï Martinsse
Le 17/11/2023 au Moulin – Marseille (13).