MAYRA ANDRADE

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[dropcap]À[/dropcap] la croisée des chemins, « Lovely Difficult », le nouvel album de la chanteuse capverdienne, Mayra Andrade est un passage quasi obligé, un nouvel envol dans la vie de cette chanteuse qui en signant ce nouvel opus a choisi de se dévoiler à son public. Elle assume son nouveau rôle de passeuse culturelle, de trait d’union entre la pop music et la musique capverdienne. En répétition de sa tournée qui se profile à l’horizon, elle a accepté de nous parler de ce nouvel album qui sera dans les bacs à partir du 11 novembre prochain.

« Lovely Difficult » s’inscrit-il dans une continuité ou est-il en rupture totale avec vos précédents albums ?

Je dirais plutôt dans la continuité, même si le virage que je viens de prendre est des plus serrés. La moitié de l’album est en créole, mais aussi en portugais. Au niveau des sonorités, je mêle aux rythmes capverdiens, la pop et la musique contemporaine, jusqu’à présent personne n’avait vraiment osé. J’effectue une sorte de lien et le fil rouge n’est autre que ma propre voix entre les différentes musiques. Je ramène à la pop une couleur exotique et à la musique de mon pays des influences pop. Mais au-delà de tout, il faut savoir que mon album est cohérent et authentique, ce n’est pas un patchwork sans âme. L’album a son identité.

De nombreux artistes ont composé des chansons qui figurent dans l’album, c’est le cas de Benjamin Biolay.

Je tiens à saluer tous les artistes qui ont apporté leur contribution à mon album : Yael Naim et David Donatien, Piers Faccini, Benjamin Biolay, Hugh Coltman, Krystle Warren, Pascal Danae, Mario Lucio Sousa, etc. Benjamin Biolay a composé une chanson qui s’appelle « simplement ». A travers ce texte, j’ai voulu assumer ma voix qui s’est dévêtue avec cette nouvelle couleur et ce nouveau projet.

Quelle est la chanson la plus emblématique de votre album ?

C’est une chanson en langue créole « Ténpu Ki Bai » (le temps qui va), dans laquelle j’évoque la fuite du temps. Je parle du temps avec un T majuscule qui nous emporte et qui finit par prendre les plus fragiles de nous tous. Le temps qui nous prive des gens que l’on aime. Pour moi le temps est une toute puissance et il est vrai que lorsque l’on prend de l’âge on comprend que nous ne sommes pas éternels. Je me suis dite à un certain moment : « que restera-t-il après ta propre mort ? » Et là j’ai pris conscience, que ce qu’il restera sera certainement une image, mais surtout le son de ma voix. Combien de chanteurs ont disparu et que nous reste-t-il d’eux : leur voix !

On sent une pointe de « saudade » dans vos propos.

Tristesse et réalisme. J’ai perdu de bons amis, j’ai vu leurs corps disparaître, mais jamais les voix. Pour moi le temps dépasse l’histoire, la vie même.

On dit souvent de vous faites partie de ces artistes capverdiens qui appartiennent à la « génération Pantera », êtes-vous d’accord avec cette assertion ?

Orlando Pantera est un bel exemple de ce passé que l’on ne peut changer et qui nous colle à la peau. Il était l’un de ces amis que j’ai vu disparaître. « Génération Pantera », je ne sais pas si l’on peut vraiment parler de génération, car cela sous-entendrait que de nombreuses personnes se reconnaissent et revendiquent l’héritage musical d’Orlando Pantera, ce qui n’est pas certain. Par contre, je sais une chose à l’époque où j’ai fait sa connaissance, je me cherchais et il a guidé mes pas. Personnellement, j’avais une relation directe avec lui, une véritable amitié nous unissait.

Qu’est-ce qu’il vous a apporté de manière concrète ? Est-ce que l’on peut parler de legs culturel à votre égard ? Douze ans après sa disparition, qu’est-ce qui vous reste de lui ?

Quand il est décédé en 2001, je n’avais pas encore sorti mon premier album, cependant, il a été pour moi et demeure encore aujourd’hui un modèle. Il m’a insufflé la liberté dans la création, l’idée même que l’on peut faire quelque chose de nouveau dans la musique capverdienne, tout en préservant son authenticité. En portugais ,on dispose d’un mot la « Ousadia » qui est le fait d’oser d’affronter avec courage la nouveauté et les défis qui se présentent. Je crois que le message d’Orlando est bien passé car dans ce nouvel album, j’ai apporté plus de moi-même, j’ai osé !

Léa Raso

Le 08/11 au Cargo de Nuit – Arles (13), le 09/11 au Théâtre Lino Ventura, dans le cadre du New Jazz Festival – Nice (06) et le 14/11 à Victoire 2 – Montpellier (34).

facebook.com/mayraandrade

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