LOÏC NOTTET

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Après un premier album sorti en 2017 « Selfocracy », Loïc Nottet signe son retour avec « Addictocrate ». C’est son troisième album studio, mais le premier en français. Entre sagesse et excès, « Addictocrate » a été pensé comme une renaissance. L’artiste nous confie comment est né son nouvel opus qui comme pour les précédents a un néologisme comme titre. 

Peux-tu nous parler du titre de ton 3ème album « Addictocrate ». Pourquoi ce nom ?

Je suis quelqu’un qui en veut toujours plus. Je suis éternellement insatisfait et donc ça m’est déjà arrivé que ça me fasse beaucoup de mal. Il y avait un truc assez évident dans ma tête, parce que dès que j’ai commencé l’album, directement je me suis dit que j’aimerais bien retourner à mes racines. Je me suis rappelé de la danse, mais aussi des décors qui sont associés à la danse donc les opéras ou les théâtres. J’ai vu beaucoup de dorure et après en creusant, je me suis rendu compte qu’il y avait aussi les peintures de la renaissance ça me parlait beaucoup.

L’album, je le voyais un peu comme une renaissance, donc de là est venu le mot aristocrate. Et là, je me suis dit ok d’accord pour le côté un peu baroque, classe, un peu ancien. Et ensuite, très vite, c’est devenu « Addictocrate ». Il y a ce côté où déjà d’une part on est dans une société qui est remplie d’addictions, et peu importe lesquelles, pas forcément la drogue ou l’alcool. Cela peut être la cyberaddiction, il y en a beaucoup. Les addictions sont omniprésentes et associées au fait que je suis éternellement insatisfait et que j’en veuille toujours plus, je trouvais ce sentiment un peu de dépendance aux sensations. J’adore vivre des sensations aussi et donc il y a un truc où j’ai toujours envie d’aller plus loin, où je me dépasse en permanence. Je disais tout à l’heure que parfois ça me fait du mal parce que je réfléchis beaucoup à tous les détails et c’est vrai que ne jamais être satisfait ou fier de ce que tu as fait, ça fait du mal. C’est un peu un cercle vicieux. 

Pour ce nouveau projet, tu as collaboré avec la Maison Natan. Peux-tu nous raconter comment s’est réalisé la participation du monde de la mode pour ton nouvel album ?

Alors, ce sont eux qui sont venus à moi sur Instagram. Ils m’ont dit qu’ils attendaient qu’on se rencontre. Il faut savoir que la maison Natan en Belgique, c’est vraiment une maison pour femme de base. Cela faisait longtemps que j’avais envie de collaborer avec une maison de couture. Il y avait un aspect très authentique où je me suis dit si on arrive à faire des pièces pour moi. Ça sera des pièces qui seront uniques parce que personne dans le monde n’aura les mêmes. On s’est rencontré et ça s’est très bien passé. J’ai un petit peu expliqué ce que je voulais, c’est à dire que j’étais fort dans le noir, de l’oversize, mais aussi que j’aime beaucoup le « structuré » avec les épaulettes etc. J’avais aussi envie d’aller dans des matières plus osées avec des perles ou des strass. Ce que je n’osais pas avant. Et j’ai commencé à dessiner des croquis à la maison, je les ai envoyés et leur atelier a traduit mes croquis. Ensuite, on a recherché des pièces de leurs anciennes collections, des pièces des années 80,90, comme des manches, des coupes parfois et on les a modernisées à nouveau. C’était vraiment une collaboration enrichissante.

Nous parlions des mondes culturels dans lesquels tu explores ta créativité et le domaine littéraire a lui aussi eu le droit à une parution signée Loïc Nottet. La question est y a t-il quelque chose que tu ne saches pas faire. Trêve de plaisanterie, comment est né ton roman «  Les aveuglés – Le palais des murmures » paru en février 2023 ?

En fait, c’est fou parce que c’est lié à la musique. C’était lorsque je composais mon premier album « Selfocracy » et que j’étais en studio en train d’enregistrer, j’ai eu des flashs de personnages, des apparences, de scènes aussi. Comme je disais tout à l’heure mon inconscient a toujours une longueur d’avance et je ne comprenais pas trop ce que c’était. Et au final, au fur et à mesure des années je me suis rendu compte que c’était une histoire. J’avais une histoire dans la tête que j’avais envie de raconter. L’équipe de Michel Lafon est venue à ma rencontre. On a discuté de ce fameux projet et ensuite moi j’ai continué à creuser pendant 2 ans et demi parce que je voulais vraiment que l’univers soit fort. Je savais que ça ne s’arrêterait pas qu’à un seul livre. J’ai préféré prendre mon temps et ça s’est super bien passé parce qu’ils ont été très ouverts à mon univers, qui je sais, parfois peut paraître sombre aussi. Ils ont été en accord avec les thématiques aussi parce qu’on parle quand même de « suicide ». Pour moi, c’était important que ce mot arrive, même si c’est un mot qui est dur et qui n’est peut-être pas forcément agréable à lire, c’est quelque chose qui existe. Je veux dire qu’il y a un mot pour ça. Je trouve ça important de mentionner les choses. 

Il y a un autre monde avec lequel tu es particulièrement familier. Je parle bien sûr de la danse. L’un des titres de l’album se nomme « Danser », nous l’avons découvert comme second single pour ce projet. Peux-tu nous en dire plus sur la signification du morceau ?

Pour moi « Danser » c’est une chanson dans laquelle j’incite tout le monde à être qui il est et à faire ce qu’il aime dans la vie et ce qu’il a envie de faire. Moi c’est la danse, donc c’est pour ça que je dis « danser » et donc, au final, je dis moi j’aime danser. Tu peux m’insulter, me martyriser de tous les côtés, je m’en fiche, je continuerai de danser, parce que c’est ce que j’aime faire. Le vrai message c’est « soit qui tu es et sois en fier ».

Il y a un élément que nous ne pouvons pas ne pas remarquer à l’écoute de ton opus c’est qu’il est intégralement en français ! Quel a été le déclic pour qu’il soit 100 % francophone ? Une suite logique à ton titre « Mr/Mme » issu de « Sillygomania »?  

« Mr/Mme » a été vraiment une grosse porte d’entrée. J’avais très très peur à l’idée de la sortir. Ça ne devait pas être une chanson à la base, ça l’est devenu ensuite. Quand je l’ai sorti, j’étais un peu stressé, car c’était la première fois que je chantais en français. En plus, c’était un texte où je me livrais énormément. Il y a une certaine pudeur qui s’installe et j’étais un petit peu mal à l’aise. Puis au final quand j’ai vu l’accueil du public, c’est vrai que ça m’a quand même bien rassuré. J’ai toujours l’impression que ma musique a une longueur d’avance sur moi. Mon inconscient artistique savait qu’on allait aller en français pour le prochain projet et c’était donc logique que « Mr/Mme » soit à la fin d’un album en anglais, pour dire la suite sera en français. Je n’écoutais pas beaucoup de musiques francophones et je ne savais pas trop comment m’y prendre. En même temps, j’avais vraiment envie parce que je sentais que niveau instinct c’était maintenant ou jamais, donc je me suis lancée.

C’est un album très surprenant, tant dans les sonorités classiques et urbaines qui s’entremêlent que dans les textes qui sont très introspectifs. Si tu devais résumer « Addictocrate » à nos lecteurs, que leur dirais-tu ? 

Tu l’as dit ! Je dirai que pour moi « Addictocrate » c’est un gros travail d’introspection. J’ai creusé énormément au plus profond de moi. Parfois l’introspection ça fait mal mais au final on en ressort plus fort. Donc oui c’est un voyage introspectif et j’espère que ça parlera aux personnes qui l’écouteront.

Peux-tu nous donner ton top 3 et nous dire en quelques mots pourquoi ces titres? 

Je vais dire « Révérence » par rapport au fait que moi, je n’ai pas envie de grandir. C’est vrai que le fait de voir que la vie avance et que le temps passe, on ne veut pas forcément revenir en arrière. C’est quelque chose qui me fait peur. Je dirai ensuite « Je t’haine », car je l’ai créé en studio. Elle n’était pas prévue sur l’album à la base. On était en studio pour finaliser les titres et je me suis isolé de mon côté. J’ai fait cette chanson en une dizaine, vingtaine de minutes. Elle est venue très rapidement. Et enfin, la troisième, « Addictocrate », parce qu’il y a pour moi l’explication du titre de l’album. Il y a aussi ce côté hybride qui est très excitant et très marqué. Je trouve que musicalement, il résume bien l’univers.

Mon gros coup de coeur est « Nuit blanche », il retranscrit parfaitement les doutes que l’on peut avoir en pleine insomnie. Tu chantes « j’aimerai planer », un pléonasme assez drôle lorsque la rythmique du morceau est très addictive par son côté planant justement.  Quelle est l’histoire de ce titre ?

Je sais même plus si on peut appeler ça des insomnies, parce que c’est vrai que je vais dormir tous les jours à 5h30 ou 6h du matin. « Nuit blanche », c’est venu parce que parfois, j’aimerais bien aller dormir plus tôt. Je sens que mon corps en a besoin. Et je n’arrive pas à le faire, parce que je tiens aussi à mon moment tout seul, à regarder une série en pleine nuit. Parfois c’est un peu compliqué. « Nuit blanche » est arrivée dans une nuit comme ça et je me disais : « mais enfin pourquoi j’arrive pas à dormir ». Gros questionnement sur soi, mais en même temps je ne voulais pas que ce soit quelque chose de négatif, car j’aime bien vivre la nuit. Je voulais garder ce côté rêveur avec Morphée etc.

Ton album a 13 morceaux, débute par « Addictocrate » et se termine sur « Mélodrame ». Peux nous expliquer le choix du positionnement des titres ?

« Mélodrame » je savais directement, car quand je l’ai composé, j’avais seulement la chanson qui s’appelle « Con ». Je savais qu’elle serait en dernière, que ça serait le final. Ensuite, quand « Danser » est arrivé, je me suis dit ça va être la deuxième, parce qu’avant il y aura une intro. Pour toutes les autres, c’est juste que j’essaie toujours de varier les sonorités et les rythmiques. A titre perso, écouter un album qui se ressemble du début à la fin, ça me saoule, donc j’avais envie d’avoir quelque chose où chaque titre avait une vraie identité et pas juste du remplissage. Et en même temps je voulais que les moods et les ambiances diffèrent. C’est comme une montagne russe, ça accélère puis ça ralentit puis ça monte. J’essaye vraiment de construire comme ça quand je fais un album.

Tu as annoncé sur tes réseaux le nom de la tournée qui arrive, un mot sur le « Addictocrate Tour » et ce à quoi ton public doit-il s’attendre ?

À de la danse, évidemment. Des costumes aussi. J’ose beaucoup plus en termes d’out-fit aujourd’hui. Je viens avec des pièces de la Maison Natan par exemple. Les danseurs sont aussi parfois habillés en Natan. Je voulais quand même que ça brille, mais en restant dans l’élégance quand même. Donc de la danse, de la musique live, un show à la fois sombre et lumineux. 

Comment est née l’idée des différents « Addictocrate » (libre, ambitieux, amoureux, pragmatique) que l’on retrouve sur ton site internet via un quizz pour illustrer l’album ?

En fait, je travaille avec une équipe digitale qui m’a amené cette idée là, du fait je sois un immense fan d’Harry Potter. Ils me disent « est ce qu’on pourrait pas faire une déclinaison des quatre maisons mais avec « Addictocrate »». Ensuite, on a choisi les couleurs, les noms « libre », « amoureux », « pragmatique », « ambitieux », et après on s’est dit qu’un blason pourrait être sympa pour que les gens puissent le mettre sur leur hoodies etc. Tout pour avoir une vraie dimension très Harry Potteriène (rires).

Clara De Smet

loicnottet.com 

Le 06/12/2023 à l’Espace Julien – Marseille (13).

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