LAURENT GARNIER

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Né dans une famille de forains à Boulogne-Billancourt, le papa de la techno savait déjà très jeune que son destin était tout tracé. Un destin musical qui débute dans une chambre transformée en véritable discothèque où derrière ses platines, le jeune Garnier s’imagine faire danser les foules et anime les soirées familiales dès qu’il en a l’occasion. L’histoire adolescente aurait pu finir ainsi.

 

Mais la vie en décida tout autrement. C’est lorsqu’il déménagea à Londres pour devenir valet de pied de l’Ambassadeur de France après être sorti premier de l’école hôtelière que tout s’enclenche. Il découvre les nuits anglaises et franchit les portes du club Hacienda à Manchester ne tardant pas à jouer les premiers disques venant de Détroit et du label Underground Resistance. C’est aussi là-bas qu’il y découvre les raves-party et essaie d’amener ce courant musical britannique sur la scène française. Privilégiant l’aspect musical comme vecteur d’organisation de ces fêtes, il s’éloigne de ce mouvement lorsque la drogue d’abord puis l’argent deviennent les raisons majeures de l’organisation de ces rassemblements.

 

« La techno est la dernière révolution musicale du XXe siècle. »

A ses origines, à Detroit, dans les années 1980, la techno était une musique synthétique créée avec des machines dans le but de faire danser. Le concept est plutôt basique et hédoniste. Instrumentale, elle n’a pas vocation comme le rap, par exemple, à traiter des problèmes des quartiers. Si les machines sont privilégiées, elles ne sont pas exclusives. Par exemple, le saxophone est au cœur du tube « The Man with the Red Face » de Laurent Garnier. La techno est une suite logique du jazz. Comme lui, elle est une forme de liberté, d’expression et d’expérimentation, éloignée des formatages radiophoniques. Pour Laurent Garnier, elle est la dernière révolution musicale du XXe siècle et pour ce qui est des amalgames sur les drogues, ce dernier a renoncé de s’énerver contre ces raccourcis ridicules.

«  La drogue a toujours été liée au monde de la nuit et de la fête. Pourquoi stigmatiser la techno ? Est-ce que pendant le Festival de Cannes on parle de la consommation de cocaïne ? Non, on parle de cinéma. »

Même si elle est devenue une institution comme le rock ou le hip-hop, les a priori et les méconnaissances sont encore nombreux. Une partie de la population considère toujours la techno comme une musique de drogués et d’idiots. Le terme « musique électronique » est plus employé. Il fait moins peur. Il est moins radical, politiquement correct. La scène techno a un problème: elle ne compte pas beaucoup d’acteurs connus du grand public. Laurent Garnier essaie donc de la faire reconnaître à sa juste valeur en France et c’est un pari gagné lorsqu’il devient lauréat de la première victoire de la musique accordée à un album de musique électronique en 1998 grâce à son deuxième album « 30 ».

Le père de la Techno est un homme ambitieux aux multiples projets, entre deux concerts et deux avions, il travaille sur l’adaptation au cinéma de son livre : « Electrochoc, l’Intégrale 1997-2013 », version augmentée de la première parue en 2003 dans lequel Laurent Garnier continue de raconter l’histoire des musiques électroniques au travers de son expérience avec sa vision et ses commentaires sans langue de bois. Mais au-delà du côté forcément autobiographique du livre, il est également une formidable introduction à l’univers des musiques électroniques et à la culture du clubbing à travers le globe. Avec cette réédition, ce sont les dix dernières années de sa vie qui sont racontées : le mythique concert à la Salle Pleyel et le renouveau de l’électro à la française notamment. Une histoire dans l’histoire de la musique. A 48 ans, le DJ pose un regard intransigeant et passionné sur une industrie bouleversée par les nouvelles technologies. Cela fait sept ans que le projet de l’adaptation cinématographique du livre « Electrochoc » a démarré. Un projet qui a connu beaucoup de modifications depuis toutes ces années mais dont le scénario de Raphaëlle Desplechin se précise enfin d’après les dires de Laurent Garnier. Ce film ne racontera pas l’histoire de la techno mais sera sur la passion viscérale de la musique. Malgré la sortie de ce film, le DJ prévoit de continuer sa lancée de mixage et a pour but de faire de nouvelles collaborations et de produire des artistes.

« J’ai un projet de film dans deux ans, qui est l’adaptation du livre « Electrochoc », Il n’y aura pas de Jeff Mills, ni de Carl Cox ou de Laurent Garnier dans ce film. Mais ça parlera de passion, parce qu’  « Electrochoc » est un livre sur quelqu’un de passionné : moi. »

A côté de ces projets professionnels, Laurent Garnier s’accorde un temps de répit avec le Festival Yeah ! qu’il organise à Lourmarin, près de chez lui. Parce qu’il aime bien boire du vin en mangeant du fromage en bon Français qu’il est mais aussi parce qu’il désire faire un évènement familial qui ne finit pas trop tard. Ces amis musiciens et lui-même ne veulent pas grandir et veulent garder cet aspect chaleureux et amical qui leur plait tant. Le festival regroupera d’ailleurs pour cette année 2014 : Baxter Dury, Balthazar, Gramme, La Colonie de Vacances et bien d’autres. Un rassemblement à l’image de son organisateur, sympathique, ludique et bon enfant où la musique et l’amusement sont rois.

Pour ce qui est de ses sorties musicales, le DJ les prévoit de façon gargantuesque avec pour l’année 2014, le projet « Garnier » composé de cinq disques de trois titres sur cinq labels et territoires artistiques différents dont chacun aura une forte identité. Et, attention, rien ne l’empêche d’en sortir un sixième si ce dernier en a envie car Laurent Garnier revendique le fait que les artistes ne sont plus limités par les contraintes du format album. Pour la première sortie, elle fut chez Still Music et c’est le label Musique Large qui accueillit la seconde intitulée A13 du nom de l’autoroute qui relie Paris à Caen, lieu de résidence de Fulgeance, l’un des fondateurs du label (avec Rekick et Onelight). Peu étonnant que Laurent Garnier et Musique Large se retrouvent pour cette aventure quand on sait que cet EP sera à cheval entre électronique, downtempo et beat music – style dans lequel le label français s’est démarqué dès 2007 à sa création et qui a été plus d’une fois mis à l’honneur par le père de « Crispy Bacon » dans ses mixes et ses émissions.

Alors nous viens en tête quelques questions : Mais où, quand et comment Laurent Garnier s’arrêtera dans ses lancées musicales ? Seul lui détient ces réponses. Sa recette miracle pour une longévité musicale est l’honnêteté. La sincérité est importante tout comme le fait de toujours ressentir de fortes émotions derrière des platines. Le jour où il n’y en a plus, c’est que le charme s’est rompu. Il avoue aussi que si demain la techno venait à mourir complètement, il arrêterait ne voulant pas défendre un temple en ruine ni ressembler à une de ces stars des années 80 en tournée sur des bateaux.

« Je pense que le jour où je pourrai m’arrêter, je le ferai. J’ai beaucoup voyagé, j’ai fait plein de choses, j’ai envie de jouir de ma vie normale. Si j’arrête, il faut que je sois sûr de pouvoir vivre jusqu’au bout. Aujourd’hui, je ne crois pas que ça soit possible. »

Et nous en sommes bien heureux. Que vive Laurent Garnier !

 

Sarah Lonegro

Le 08/06 au Château de Lourmarin – Lourmarin (84) et le 06/08 à la Plage du Palais des Festivals – Cannes (06).

www.laurentgarnier.com

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