Zoom sur Kayo, jeune artiste strasbourgeois rencontré sur internet grâce à ses fantastiques albums de remixes, qui a récemment publié un album hommage (en vinyle qui plus est) à Gil Scott-Heron et qui a entièrement réalisé et financé son projet. Preuve que quand on croit à ce que l’on fait et que l’on y met ses tripes, la réussite est au bout ! Entretien.
Peux-tu te présenter ?
Je suis Kayo, artiste hip-hop depuis la fin des années 90. J’ai commencé par rapper, mais comme je ne connaissais personne qui faisait des instrumentaux, j’ai commencé à en faire moi même à peu près à la même période. Cela est devenu sérieux courant 2002 car j’ai composé toutes les instrumentaux du EP de Maiza “Piranhas”, où j’ai eu la chance de bosser avec des membres de la Fonky Family (Le Rat Luciano et Dj Djel). En parallèle, j’ai monté mon propre groupe avec Skitzo et DJ Nox (A-Sai) avec qui nous avons sorti un maxi vinyle et un album. Mais en 2006-2007 nous nous sommes séparés. A partir de là, j’ai commencé à bosser sur mes albums de remixes “Inner City Bootleg Vol.1 (2008) et Vol.2 (2010)” sous l’impulsion de mon ami Nakre (qui conçoit toutes les pochettes de mes projet). Courant 2010, avec Takezo, nous avons décidé de faire un album en commun appelé “Statu Quo” qui est sorti fin 2012 (il sera réédité normalement en vinyle courant 2014).
Pourquoi avoir choisi de réaliser un projet hommage à Gil Scott-Heron ?
L’idée du disque est née le jour de sa mort le 27 mai 2011. Je voulais faire un morceau pour lui rendre hommage et bout d’une semaine j’en avais déjà composés 5 ou 6. Partant de là, j’ai décidé d’en faire un maximum. J’ai fait une vingtaine de titres et j’ai gardé les 11 qui figurent sur l’album.
Que représente cet artiste pour toi ?
C’est assez difficile à dire, je trouve qu’il était à part dans le monde de la soul. Pour moi, il était plus qu’un chanteur, c’était un poète et un écrivain. Il n’hésitait pas à prendre position. Il n’était pas dans une logique marketing, il sortait des disques qui avaient un sens pour lui. D’ailleurs son sur 1er album “Small Talk At 125th & Lenox” (sorti en 1970) il faisait déjà du spoken word, il ne chantait pratiquement pas. Pour moi, c’était un rappeur.
« Pour moi, Gil Scott-Heron était plus qu’un chanteur, c’était un poète et un écrivain. Il n’hésitait pas à prendre position ! En 1970, il faisait déjà du spoken word. C’était quasiment un rappeur. »
Combien de temps a duré la composition ?
2 mois en tout. Le projet s’est construit en deux phases : une mi-2011 et l’autre début 2013. J’aime bien laisser reposer un projet avant de le sortir.
Pourquoi avoir choisi de le sortir en vinyle ?
C’est un support que j’affectionne particulièrement, notamment pour son grain mais aussi pour sa qualité d’écoute. Je pense qu’on n’écoute pas un vinyle comme on écoute un CD ou un MP3.
Le rapport à la musique est totalement différent. De plus, le hip-hop s’est construit avec ce support, donc pour moi, en tant qu’artiste hip-hop, je me devais de le faire en vinyle.
Quel matériel as-tu utilisé sur le disque ?
Je travaille avec une MPC 2000XL pour la pré-production, un Microkorg et un PC avec Cubase. Ca doit faire 10 ans que je bosse avec cette configuration. J’ai fait le mixage et le mastering dans mon home studio. C’est une étape importante qu’il ne faut pas négliger et je me laisse toujours du temps pour bien le faire, cela a dû me prendre 3 à 4 semaines.
Quel a été l’accueil du public pour ton projet ?
L’accueil a été excellent ! Sur les 300 disques pressés, il en y en plus de 200 qui sont partis en moins de 2 mois dans toute l’Europe (surtout en Allemagne). Le reste est parti au Japon. Même moi, je n’en ai plus à ma disposition (rires) !
Le succès de ce projet n’est-il pas un pied de nez à la dite crise du disque ?
Oui, tout à fait. Je pense que les auditeurs (et moi le 1er) ont besoin de repères. Un disque marque une période, un moment de la vie d’un artiste. Les maisons de disques disent que c’est la crise, mais à force de produire des disques médiocres, les gens se détournent d’elles.