Révélé lors de la saison 4 de la Nouvelle Star en 2006, “La Tortue” (surnom attribué à l’époque) a bien évolué. Doucement, mais sûrement. Échaudé par l’échec de son précédent projet “Rio” (sorti en 2017), Christophe Willem a pris le temps nécessaire pour sortir un nouvel album. Déchargé de la tâche d’écriture, il s’est concentré sur ce qu’il voulait livrer et comment. Plus direct, libre et sans artifice, “Panorama” offre une vision beaucoup plus vraie de l’artiste. Fier de ce rendu et ne se souciant plus du regard négatif des autres, le chanteur s’est confié à nous sur tout le travail fourni, mais aussi cette nouvelle philosophie de vie.
Depuis tes débuts à la Nouvelle Star (2006), c’est réellement la première fois où tu te livres totalement, et où l’on sent que tu parles de toi. Pourquoi ?
C’est vrai. Il y a eu plusieurs paramètres qui justifient cela. Le premier, c’est l’échec de l’album précédent, qui n’a pas vraiment marché. J’avais besoin de remettre un peu de sens dans tout cela. J’avais parfois l’impression d’être en mode pilote automatique sur les dernières années. Finalement, ce petit accident m’a permis de me remettre en question. Le deuxième paramètre fut le confinement. Pendant cette période, je me suis retrouvé chez mes parents, dans ma chambre d’ado. Je me suis comme reconnecté à ma passion. J’ai remis mon égo de côté et cela m’a donné envie de faire un projet beaucoup plus brut. Ne plus trop laisser de place au superficiel et se livrer cash.
Pour autant, tu n’as écrit aucun des morceaux présents sur l’album, comment l’expliques-tu ?
Tout simplement, encore une fois à cause de l’album précédent. Sur celui-ci, j’avais fait beaucoup de choses de moi-même, les textes, les compositions. L’échec m’a refroidi et j’ai moins eu envie de me dire “allez j’y retourne, je vais quand même écrire les textes,etc.”. Ensuite, pendant le confinement j’ai quand-même écrit des textes. Au sortir de ce dernier, j’ai tenté de les mettre en musique, mais je sentais que je tombais encore une fois dans l’écueil du dernier opus. J’accordais trop d’importance aux sons des mots. Quand je retouchais aux textes, je sentais que je perdais le côté cash que je voulais avoir. J’ai compris qu’il fallait que je confie l’écriture à d’autres et surtout des artistes qui ne me connaissaient pas forcément mieux que ça. Je ne voulais pas ce côté émotionnel qui aurait pu adoucir ce que je voulais exprimer.
Comment s’est fait le choix de ces artistes ?
J’ai rencontré énormément de personnes. Beaucoup plus que celles qui sont au final sur l’album. Il a parfois fallu convaincre certains qui ne l’étaient pas. Petit à petit, l’équipe s’est formé, principalement autour de Laurent Lamarca et Jean-Etienne Maillard. Il y a aussi eu des rencontres spontanées, comme celle avec Slimane, au détour d’une conversation lors de la tournée avec Les Enfoirés. Il y a aussi des artistes comme Cocoon, Naya ou même Elia, qui a collaboré récemment avec Booba (sur le morceau “Grain de Sable”). Tout s’est fait naturellement alors que tous ne sont pas du même univers que le mien.
Dans le style, les sonorités, les arrangements, on note également une énorme évolution par rapport à tes sorties précédentes, pourquoi ce choix ?
Déjà, entre ces deux projets il y a 5 ans qui sont passés. Puis, encore une fois, le confinement a vraiment eu une influence sur ce que je voulais vraiment ou non. De plus, les textes sont directs, donc il fallait des musiques qui puissent aller avec. La musique est venue accompagner les textes et non l’inverse. Cela donne un album où la musique amène une dynamique. Je pense par exemple à “J’Tomberai Pas” qui a presque un son de pop urbaine. Un peu comme “Toi et Moi” également. Cela donne quelque chose de beaucoup plus urbain, ce que je ne faisais pas du tout avant. La musique est là pour sublimer le tout, les propos que je porte. Pour cet album, tous les textes ont été faits avant de faire les musiques, alors que sur les précédents ce n’était pas le cas.
Est-ce pour cela que l’album s’intitule “Panorama”, comme un retour en images sur ta vie ?
Oui, il y a d’abord le côté panorama au sens figuré, où on fait un 360° sur un sujet. Et aussi panorama, car on aborde beaucoup de thèmes, mais qu’il faut également prendre de la hauteur sur ces mêmes thématiques. Il faut arriver à dépassionner les choses pour arriver à en parler de la manière la plus sincère possible.
Parmi les 16 titres du projet, “Solitude” est un morceau qui retient particulièrement mon attention. Il est très solaire alors que le titre pourrait indiquer le contraire. Il aborde en plus une thématique difficile, mais malheureusement très actuelle, le harcèlement et plus précisément le harcèlement scolaire.
C’est l’idée même de l’album. Aborder des thèmes assez prenants, comme l’exemple dont tu parles “Solitude”. Dans l’ensemble, tout fait écho autant à l’enfance qu’à des choses que l’on peut vivre adulte. La solitude que tu ressens quand tu es harcelé par exemple. Et aussi parce que justement en plus tu n’oses pas en parler, à ta famille, tes parents, etc. J’ai mis beaucoup de temps à apprécier être seul. J’avais toujours besoin d’avoir des gens autour de moi. C’est un sujet qui rebondit dans plusieurs périodes de ma vie. Dans tout le projet, tout est plus direct, même dans ma façon de me définir. Je pense à “Ni reine ni roi” où je dis que je ne suis ni l’un, ni l’autre, mais que je suis ce que je suis quand je décide de l’être. Et même si les problématiques abordées peuvent être prenantes comme je l’ai dit, je ne voulais pas que les musiques soient pesantes. Je ne voulais pas du côté “Oh mon dieu, que la vie est dure”. Je voulais véhiculer l’idée que bien sûr dans la vie on peut vivre des moments difficiles, mais en même temps rien n’est immuable. Ni les moments positifs, ni les moments négatifs. Il faut garder la même ligne de conduite, peu importe les périodes. C’est d’ailleurs ce que j’essaie de dire sur “J’avance”. J’ai entendu ci ou ça, tellement de choses sur moi, mais je continue d’avancer. Il ne faut pas se laisser parasiter par les choses négatives et les y accorder plus d’importance que cela. C’était important que l’album ne soit pas triste, lourd. Je voulais de l’optimisme.
“J’avance” est également un titre majeur du projet, car c’est justement sur celui-ci où on t’entend dire des choses sur toi que tu n’avais peut-être jamais abordé clairement avant, notamment autour de ta personnalité.
Oui, c’est vrai. Dans cet album, je suis un peu dans le “qui m’aime me suive”. Avec tout ce qu’on a vécu, et qu’on vît encore aujourd’hui, quand on vit l’état du monde actuel, on a plus le temps de se prendre la tête sur ça. Je prends le regard positif que les gens peuvent avoir sur moi, tout le reste fait plus écho en moi. Je laisse ça glisser sur moi. J’ai eu la chance d’avoir ce déclic là. Tout est plus facile et on se sent finalement même plus solide qu’avant.
Personnellement, comment as tu vécu tout le processus de création de ce projet très intimiste ?
Tout a été hyper intense. Chaque équipe a travaillé indépendamment des autres. Quand j’ai fait la production exécutive de l’album, seul moi savais ce que les uns et autres faisaient. Je tenais vraiment à garder cela comme ça pour que certains ne se disent pas que l’autre avait parlé de ci ou ça, et que de ce fait eux ne le traitent pas. Le même sujet vu par un prisme différent, je trouvais ça vraiment pertinent. Par exemple, “J’avance” ou “Ni Reine, Ni Roi”, on parle d’identité et de la façon dont on se définit, mais de deux manières différentes. “J’avance” dans le côté négatif de ce que l’on a pu vivre, entendre et à quel point les gens peuvent te coller une étiquette, souvent erronée ou incomplète. Alors que dans “Ni Reine, Ni Roi”, il y a un côté beaucoup plus poétique. Tout ce travail a forcément été long, mais intéressant. Déjà le temps de raconter à tous, s’apprivoiser pour oser se dévoiler à chacun. De là, chacun a mit ce qu’il voulait de moi, mais aussi de lui, et c’est en cela que c’est intéressant. Pour moi, un acteur, un auteur, met forcément une part de lui quand il joue un rôle ou écrit sur quelqu’un d’autre.
Un mot sur la tournée qui s’annonce. Qu’en attends-tu ?
C’est le moment le plus excitant ! Le moment où l’album prend vie ! Quand tu travailles sur un projet, pendant presque deux ans, la tournée est le moment où il prend finalement réellement toute sa dimension, car tu le partage avec le public. De plus, c’est un album très différent de ce que j’ai pu faire auparavant, avec par exemple le morceau “J’Tomberai Pas”, qui a un côté beaucoup plus rentre dedans. Et en même temps, des titres plus acoustiques comme “La Fin des Choses”, que je n’ai également pas eu l’habitude de faire avant. Toute la tournée s’annonce donc très différente, rendant cela vraiment très excitant. Cela a un côté renouveau, un côté découverte, que j’adore. Dans la préparation, avec toutes les équipes, je sens clairement la différence avec les tournées passées. J’ai vraiment hâte !
Maxime Martinez
Le 02/03/2023 à La Palestre – Le Cannet (06), le 08/04/2023 au CEPAC Silo – Marseille (13), le 14/04/2023 au Pasino – La Grande Motte (34), le 15/04/2023 au Théâtre Galli – Sanary-sur-Mer (83), le 11/07/2023 au Théâtre de la Mer – Sète (34) et le 20/07/2023, dans le cadre du festival Les Lives de Saint-Raphaël au Palais des Congrès – Saint-Raphaël (83).