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Pour la sortie de son nouvel album « Méridiens », Chapelier Fou nous présente ses derniers projets. Comme autant d’échos aux compositions de « Méridiens », l’artiste multi-instrumentiste annonce 12 titres supplémentaires, avec la sortie de l’album « Parallèles » au printemps prochain. Ni jumelles, ni opposées, ces nouvelles compositions, totalement originales, ambitionnent d’approfondir l’exploration d’un univers déjà foisonnant. Deux fois douze titres, les uns répondant aux autres sous forme d’anagrammes.
Comment appréhendez-vous la sortie de votre nouvel album « Méridiens »?
Très mal. Parce que à chaque fois que je fais quelque chose, j’ai l’impression que c’est tellement personnel et tellement hors norme et non commercial, que ce sera forcément un flop. En tout cas j’en suis très fier, mais j’ai du mal à me dire que cela peut avoir un écho chez quelqu’un. Cela reste toujours merveilleux de me dire que je créé des disques, je n’y crois toujours pas !
Cette année, cela fera dix ans que vous avez sorti votre premier EP. Que ressentez-vous face à votre évolution musicale durant ces dix années ?
Je suis passé par plein de phases différentes. Je pense que j’ai toujours fait la même chose, mais lorsque je regarde rétrospectivement, je me rends compte que je ne travaille plus de la même manière, que je ne fais pas la même musique et qu’elle s’est densifiée. Avant, c’était peut-être plus simple, moins fouillis, moins dense. J’essaie de revenir à certaines choses plus minimalistes et plus directes, avec l’impression d’avoir maintenant le choix. A mes débuts, c’était plutôt par défaut que j’étais minimaliste, peut-être parce que je ne savais pas faire des choses vraiment complexes. C’est en faisant des compositions plus complexes, que je peux désormais m’apercevoir que j’ai le libre arbitre pour faire ces choix là. En ce moment je me dis que ce n’est pas parce que je sais faire des choses compliquées, qu’il ne faut pas que je fasse des choses simples. J’étais justement en train de répéter version live du premier morceau de « Méridiens », il n’y a quasiment rien, juste des violons et cela me fait plaisir.
Comment s’est passée la création de l’album « Méridiens » ? D’où proviennent vos idées, votre inspiration et votre création ?
Je ne sais pas du tout, c’est un grand chantier. De plus, cet album n’est que la moitié du projet, parce qu’il y a un deuxième disque qui sort dans foulée qui s’intitule « Parallèles ». Cela a été difficile pour moi de travailler sur ce projet, avec mes deux enfants qui sont arrivés entre temps, ma vie a un peu changée. J’ai l’impression de ne plus avoir le temps de travailler, mais paradoxalement je sors deux disques. Cela fait 24 titres en tout. Cela m’a demandé de faire un gros tri, parce que j’en avais fait beaucoup plus que ça. Et je n’arrête pas, c’est devenu animal de fabriquer des morceaux. Les morceaux sont marqués par l’époque, mes réflexes et mes habitudes, du moment qu’ils ont des sons, des instruments, mais l’unité il n’y en a pas. L’unité est faite parce que tout a été enregistré ensemble, créé ensemble avec les instruments que j’avais sous la main, dans un grand désordre. Je fais des disques qui sont très éclectiques et très éclatés. Entre les morceaux « L’État-Nain » et « Cattenom Drones » il y a des années lumières entre les deux.
Vos études et votre formation en musique classique joue certainement sur votre façon de composer aujourd’hui. En quoi les influence-t-elle ?
Un peu, cela m’aide quelquefois et parfois cela m’empêche de faire des choses. Comme j’analyse pas mal ce que je fais, j’ai comme un radar, une détection du « trop facile », et c’est vrai que j’ai une tendance à m’empêcher de faire du trop facile parce que ça déjà été trop fait. Je pense que cette culture et ces études me permettent d’avoir une lampe rouge qui me dit : « là, ce que tu fais, ça ne va pas ». Ce qui m’intéresse c’est de faire quelque chose d’originale. Je n’ai pas envie de recréer des choses déjà faites, et dieu sait que tout le monde se répète aujourd’hui. Là, j’étais en train de répéter le morceau « L’Austère Nuit D’Ubqar », et je ne sais pas comment agencer les voix, parce que tu ne peux pas rejouer tel que ça a été créé sur le disque. Ce morceau là, a été enregistré avec cinq prises de violons successives, j’essaie de doubler cela et pour arranger le tout, il n’y a rien de plus efficace que le papier à musique. Dans ces disques, il y a notamment des canons, et c’est très difficile d’en faire si je ne l’écris pas. Idem pour le titre « Everest Trail » qui est presque mathématique.
Préférez-vous travailler seul ou faire des projets avec d’autres artistes ?
Je suis vraiment solitaire. Je l’ai réalisé il y a quatre jours dans ma voiture. C’est une chose dont je ne m‘apercevais pas, car je suis tellement solitaire, que je n’en parlais à personne. Je suis très bien seul, j’aime beaucoup travailler seul et je passe de grandes journées seul, à jouer de la musique. J’aime aussi partager des moments avec des amis, et quand j’ai la chance de trouver des gens avec qui je m’entends bien – et c’est rare -, et bien c’est juste génial. J’ai passé quatre années en groupe avec des gens invraisemblablement cool et c’était fou de pouvoir embarquer les gens dans mon délire, c’était démentiel.
Vous avez plusieurs dates de prévues dès début mars, avez-vous hâte de jouer en live et de retrouver le public ?
Beaucoup oui, cela faisait longtemps, plus d’un an que je n’avais pas joué, donc je bouillonne totalement.
Quelle est la journée type de Chapelier Fou ?
Je suis très routinier, je fais de la musique de 9h à 12h, ensuite je vais nager, je mange et je refais de la musique de 14h à 17h. Je fais quand même 6h de musique par jour environ.
Quels sont vos prochains projets ?
Pour l’instant je suis concentré sur la tournée. Mes idées et mes volontés du moment sont de monter un concert type musique de chambre. J’ai envie de continuer à faire des installations d’art contemporain, ça me plaît techniquement et musicalement. Bosser sur Beethoven, continuer à faire des installations sonores, continuer d’acheter plein de synthétiseurs. Cela fait longtemps que je fantasme de faire un projet parallèle, de faire quelque chose avec les machines, tout ce que je critique en quelque sorte. J’ai envie de quelque chose où je tournerais juste les boutons, où il n’y aurait pas de risque, juste de l’amusement. Ce que je fais sur scène c’est très ambitieux, et cela me stresse. C’est sérieux même si je prends du plaisir sur scène, cela me demande beaucoup de concentration. J’aimerais bien avoir une soupape plus légère. C’est l’électronique qui m’intéresse le plus sont les instruments acoustiques, c’est super de les avoir en possibilités.
Olivia Maldonado
Le 21/03/20 à La Moba – Bagnols-sur-Cèze (30), le 04/04/20 au Makeda – Marseille (13), le 24/04 à la Secret Place – Saint-Jean-de-Védas (34).