Le 22/10/21 au théâtre Francis Gag – Nice (06).
Le duo XAMP est composé de Fanny Vicens et Jean-Etienne Sotty. Ils jouent tous deux de l’accordéon microtonal. Mais quid de l’accordéon microtonal ? C’est assez simple, c’est un accordéon qui a subi une opération des anches par le luthier Philippe Imbert, afin que les instrumentistes puissent jouer des quarts de ton, en plus des demis ton habituels. Le programme de la soirée est intitulé: “Pulse dans les Arcanes du son”. Dix pièces en quatre parties. La plupart spécialement écrites pour cet instrument et même pour ce duo. Les deux accordéons sont reliés chacun à un pédalier digne d’un guitariste de métal, plus quelques boitiers électroniques destinés à nous emmener au cœur du son. Pour nous mettre dans l’ambiance, ils commencent par “Véga”, une composition d’Edith Canat de Chizy, présente dans la salle, les deux instruments sans appui d’électronique. On découvre alors les sonorités de ces accordéons augmentés. Des aigus puissants, des notes qui vrillent, le glissement du tonal traditionnel vers le microtonal avec cet effet de fluide qui s’écoule. Après cette introduction, ils jouent “Pulse”, une suite de six compositions de six auteurs différents et là, les boitiers et pédaliers entrent en jeu. Les sons des deux instruments se mêlent intimement, on ne parvient pas toujours à distinguer exactement d’où proviennent les notes. Fanny Vicens se sépare provisoirement d’une de ses chaussures pour mieux affleurer son pedalboard. Dans la deuxième pièce “En stries”, on entend des mouettes pas franchement rieuses avant que les doigts de Jean-Etienne Sotty et Fanny Vicens usent des touches noires et blanches comme instruments de percussions dans un “Electro Tango” fort peu argentin. Plus tard, c’est en frottant le soufflet du revers de la main qu’ils accompagneront la mélodie. On ne peut décrire tous les sentiments qui nous assaillent car cette musique, il faut aussi la voir. C’est particulièrement le cas des “Arcanes” qui vont clore le concert. Une création pour ce MANCA d’une commande du CIRM. Monica Gil Giraldo, réalisatrice en informatique musicale, a concocté une trame sonore numérique que diffuse des haut-parleurs dans la salle sur laquelle les deux accordéonistes joueront la partition écrite par Edith Canat de Chizy. Cinq arcanes de tarot ont inspiré cette musique qui semble cependant plus inquiétante qu’ésotérique. Vous pourrez l’entendre car elle a été enregistrée pour un futur album du duo.
Une magnifique soirée qui prouve, une fois de plus, que la musique contemporaine n’est pas réservé à une quelconque élite ou à des amateurs éclairés, non, il suffit d’avoir les oreilles et l’esprit grand ouvert même si les harmonies peuvent parfois paraître déroutantes. Il convient d’associer à la réussite de ce concert, Camille Giuglaris, pour la qualité du son qui contribue grandement à l’émotion perçue .
Jacques Lerognon