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Le 07/10/18 à La Maroquinerie – Paris (75)
« J’y étais » Pouvoir prononcer ses mots, avoir foulé le sol de La Maroquinerie et communié avec les deux cent quatre-vingt-dix neufs autres privilégiés présents ce soir-là, c’était être, très précisément, au bon endroit au bon moment. Privilégiés il fallait l’être, en effet, tant les places permettant d’accéder à ce double concerts, Deafheaven et Inter Arma, s’étaient envolées rapidement. Soirée cent pour cent metal U.S. et une ouverture des portes à 19h30 précise. La Maroquinerie ne faillit pas à sa réputation, un personnel accueillant, une entrée en toute fluidité, une orchestration des shows ultra-millimétrée et un son extrêmement confortable, tant par sa qualité que par son niveau de décibels. 19h45, Inter Arma ouvre la messe. Fort de ses douze années d’existence, le quintet de Richmond en Virginie, monte sur scène avec la ferme intention de marquer les esprits. Mélange de doom, de sludge et de stoner, la musique d’Inter Arma accompagnée de la voix incantatrice de Mike Paparo, propulse le public vers des sommets vertigineux, puis l’accompagne dans une plongée aux tréfonds de l’âme. Le groupe est très présent sur scène et, professionnalisme outre-Atlantique oblige, les musiciens offrent un show parfaitement rodé. Le son lourd de la batterie souligne parfaitement les guitares lentes et appuyées. Le set est court, mais les morceaux longs. Quatre titres pour quarante-cinq minutes d’une mise en abime réussie.
Set List : The Long Road Home – An Archer in the Emptiness – The Paradise Gallows – Primordial Wound.
20h30, les lumières se rallument dans la salle pour le changement de matériel. Moment propice aux discussions et aux échanges de premières impressions. Sur scène, les roadies, acteurs invisibles mais ô combien indispensables, mettent en place le final d’une pièce qui, ce soir, se joue en deux actes… 20h45, l’obscurité reprend sa place et le public de La Maroquinerie scande le nom du groupe phare de la soirée. Les premières notes de guitare retentissant, les membres de Deafheaven déjouent les ténèbres et viennent illuminer la scène. L’aura aveuglante du groupe plonge l’assistance dans une béatitude qui frôle l’hypnose. Le charisme du chanteur, Georges Clarke, fait écho aux compositions géniales du guitariste Kerry McCoy. Le son est parfait, l’interprétation des titres issus des trois derniers albums est magnifique. Georges est déchainé, il hurle avec une justesse indéfinissable et finit la première chanson littéralement liquéfié. Le groupe se donne à cent-dix pour cent. La panne de la tête d’ampli de Shiv Mehra, deux morceaux avant la fin du set, n’entache en rien le show des californiens qui, avec une facilité déconcertante, adaptent immédiatement leur jeu de façon à couvrir le silence du second guitariste. Shiv en profitera, d’ailleurs, pour s’offrir un stage diving durant le dernier morceau. Le groupe est visiblement aux anges. L’intensité de l’atmosphère émotionnelle est telle qu’elle laisse penser, un instant, que Deafheaven a véritablement choisi son audience ce soir et non l’inverse. Le blackgaze shakespearien interprété par le quintet caresse et se laisse caresser en retour, les mains se prennent dans l’audience, les cœurs fusionnent et le moment de grâce se conclue après une heure de pure poésie underground. Le groupe quitte la salle en saluant, une dernière fois, un public conquis et bouleversé. Nul doute que, ce dimanche soir, du fond des enfers, le Diable lui-même aura pleuré.
Set List : Honeycomb – Canary Yellow – Sunbather – Brought to the Water – Worthless Animal – Glint – Dream House.
Aurélie Kula