BIG REGGAE FESTIVAL

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Le 02/07/2024 à la Pinède Gould – Antibes-Juans-les-Pins (06).

C’est assez incroyable mais le Big Reggae Festival en est à sa 27 ème édition. Il a été conçu comme une co-production entre Mediacom, le plus grand tourneur reggae français, et Pie des arts, un organisateur local. C’est une bonne idée car cela permet de répartir les risques et de proposer d’importantes têtes d’affiches sans prendre de risques financiers démesurés. Après le triste décès de Thierry, le fondateur, les jeunes de l’équipe ont repris le flambeau, pour le meilleur, il y a quelques années.

Organisé au bord de mer au parc de la Pinède de Juans les Pins, lieu mythique du festival Jazz à Juan, le Big Reggae draine une foule nombreuse et plutôt jeune. Voir cette jeunesse fait plaisir et est de bon augure pour le reggae qui a souvent un public vieillissant qui s’accroche parfois hystériquement à de vieilles gloires du mouvement sans se rendre compte qu’il bloque un certain renouveau artistique et public. Ainsi, se précarise l’avenir même de ce mouvement artistique qui ne compte que sur le public des concerts pour exister de manière pérenne, l’investissement de l’industrie musicale étant carrément inexistant.

La contrepartie pour ce public de plusieurs milliers de personnes venues en masse, c’est qu’accéder aux 4 bars relève du rêve ou au mieux de l’espoir mais pas d’une réalité si on ne veut pas passer la moitié d’un concert à faire la queue. Ayant donc gardé ma sensation de soif toute la soirée, je me suis rabattu sur la musique live. En même temps, j’étais venu pour ça pas pour boire (heureusement) donc …

Le show a commencé avec le sénégalais Lil Diop, un excellent chanteur mais qui peine à composer des titres tenant la route sur toute leur longueur. Il y a du progrès même s’il pourrait mieux faire pour servir ses capacités vocales qui sortent de l’ordinaire. Ensuite c’est Taïro, qui a occupé l’espace visuel et sonore. Comme toujours, il a mis une ambiance torride avec un super band et ses titres que tout le monde ou presque est capable de chanter. Au fil des années le lien qu’il a créé avec un public de tout âge est toujours aussi fort. Tout le monde chante et danse avec lui. C’est toujours une fusion unique que le temps n’érode pas. Un jour, j’ai écrit qu’il était le seul bonobo sociologue que je connaissais, ça l’a bien fait rire ! Pourtant c’est exactement ça. Toujours cette pertinence, cette intelligence pour décrire notre monde, imager son devenir et cette joie de vivre tournée vers l’avenir, j’adore !

S’en est suivi un concert, que j’ai trouvé assez moyen, de Kymani Marley après un Taïro toujours aussi charmeur et un Naaman qui a tout cassé ! Le niveau du reggae français a grimpé en flèche en 20 ans et les spectateurs du Big Reggae Festival ont pu s’en rendre compte hier. Le band avait un très gros son mais peu de vibes. N’ayant visiblement pas fait de balances, le groupe a fait un line check brouillon devant des milliers de personnes. Ce que je n’ai pas trouvé très pro, d’autant que les problèmes de son de scène se sont multipliés tout le concert. Kymani lui semble manquer de conviction et sur les quelques reprises des chansons de Bob, par ailleurs assez mal choisies d’après moi, c’était pour moi insuffisant. Le public a quand même dansé et applaudi chaleureusement ! L’optimisme rafraîchissant de la jeunesse sans doute…

Pour clore la soirée, encore un super concert de Naâman au Big Reggae Festival ! Pourtant pour Naâman, au départ, ce n’était pas gagné du tout. Je l’ai vu la première fois il y a presque 20 ans, c’était un gamin qui essayait de toaster à la Jamaïcaine. C’était à Bagnols sur Cèze en 2005 ou 2006 au Jah Sound Festival en ouverture à 18 heures. Ce concert est devenu mythique quand il a perdu sa chaussure. En dansant, celle-ci s’est envolée à dix mètres de haut, formant un magnifique tir en cloche, pour retomber dans le public (il en a fait ensuite une chanson skanking shoes). Il a fini le concert en chaussettes devant un public hilare. Malgré les maladresses, on voyait déjà toute sa volonté. Naâman, aujourd’hui ce sont de magnifiques chansons, un véritable univers artistique personnel et un flow anglais impeccable, un band qui joue à la perfection et son fidèle Fat Babs au beatmaking. Naaman est un bosseur perfectionniste et ça s’entend aujourd’hui vraiment. Sa musique possède une véritable personnalité qu’on ne peut confondre avec aucune autre. Ce qui n’est pas offert à tout le monde en France. Si le set a fini sur des titres que j’aime moins, ce n’était pas l’avis du public qui a crié et dansé tout ce qu’il pouvait.

Encore une belle édition du Big Reggae Festival, opportunément placée sous le signe d’un partage transgénérationnel. Une belle image d’un reggae qui vit depuis les années 60, en renouvelant un public qui semble motivé pour des décennies encore !

Emmanuel Truchet

lebigreggae.com

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