Artiste d’origine congolaise, Camille Yembe revendique une “nouvelle pop” libre et hybride, entre chanson, rap et électro. Avec son premier EP « Plastique », elle signe un projet introspectif sur la quête de soi, où chaque morceau reflète sa sincérité brute et sa recherche d’identité artistique.
Pour ceux qui te ne connaîtraient pas encore, comment pourrais-tu te décrire rapidement ?
Je m’appelle Camille Yembe. J’ai sorti mon premier projet en juin 2025. J’aime dire que c’est de la nouvelle pop, parce qu’on sent que c’est gorgé de plein d’influences différentes, mais ce qui fait le lien de tout ça, c’est moi, mon phrasé, mes textes. Je suis d’origine congolaise.
Ton premier EP « Plastique » a eu beaucoup d’écho, notamment une chronique sur France Inter. Comment définirais-tu ton style ?
Si j’avais le choix, je ne le décrirais pas. Je fais vraiment du Camille Yembe. Je dis souvent que c’est de la nouvelle pop. Ça se veut populaire, mais on peut entendre des sonorités proches du rock, parfois de l’électro, parfois du rap dans mes compositions. Ça se veut populaire. Quand ce sera très populaire, on pourra dire que c’est de la pop (rires).
Comment est né cet EP ?
Il y a eu un EP zéro qui n’est jamais sorti. Il est né parce que je mettais beaucoup de temps à sortir mes morceaux, mais j’en continuais à faire. J’ai décidé de commencer l’histoire d’un nouveau projet avec ce que j’avais. Le morceau « Plastique » a été un déclic pour le reste des chansons. C’est un morceau où je me suis livré, dont la thématique se retrouve un peu dans chaque chanson de l’EP. C’était un point de départ. Chaque chanson a sa différence. Le morceau « Encore » est né dans une sorte de nervosité, d’urgence. Je voulais exprimer quelque chose, pas une rage, mais “cracher” quelque chose.
Que représente le morceau « Plastique » ?
C’est un point de départ. Je décris que je me suis beaucoup travesti, c’est une chanson qui appelle à la quête de ma vérité propre. On ressent vraiment la quête de se trouver soi-même, de ne plus jouer un rôle et de trouver sa voix. C’est la maladie universelle de mettre des masques sociaux, de se déformer pour plaire aux autres ou à soi. C’est un combat de toute une vie. Même maintenant, je ne m’en suis pas totalement détachée. Chaque nouvel an, ma résolution est de ne plus me soucier de l’opinion des gens. Je n’ai pas totalement passé ce cap, mais j’essaie.
Quelles sont tes influences musicales principales et comment les intègres-tu dans ta musique ?
Charles Aznavour est un gros point de départ. Il m’a fait tomber amoureuse de la langue française en chanson, sa manière de dépeindre des tableaux, raconter des histoires qui touchent. Le groupe Radiohead et Thom Yorke m’ont offert la liberté artistique, le fait de se défaire des carcans et étiquettes. Ils font juste de la musique et ont une grande résonance mondiale, ce qui m’a donné beaucoup de liberté. Je suis aussi très influencée par le rap, qui raconte des récits qui me touchent directement. Mon premier gros crush rap c’est Diams. Ensuite, il y a eu Damso, Hamza, Rilès aussi.
Dans ton style, tu alternes chant et chant parlé (spoken word). Qu’est-ce que cela apporte ?
C’est instinctif. J’ai besoin de me raconter sous différents tons. Mes influences sont diverses, je suis influencée par le rap et le chant. Parfois, la production ou la composition m’appelle à l’un ou l’autre. Ça apporte un côté brut, sans filtre, ça sort comme ça sort.
Y a-t-il un style que tu n’as pas exploré et que tu aimerais essayer ?
Non, pas un style précis, mais j’aimerais me préciser dans mon son. Le premier EP est une mise en bouche, un cheminement. Je veux affirmer un croisement de genres qui m’appartient, une « sauce » qui serait la mienne, c’est le challenge du prochain projet.
Qu’apportent la scène et le live à ton style et projet ?
Pour la plupart des gens qui me suivent, c’est par la scène. On comprend pleinement qui je suis en me voyant sur scène. En audio, on a un fragment. Sur scène, il y a une aura et une interprétation supplémentaire. Il faut me voir pour comprendre ma musique. Les visuels et clips apportent une autre vision aussi.
La musique a été un refuge pour toi, peux-tu en dire plus ?
J’ai toujours été passionnée par la musique via Internet, les télé-crochets, je rêvais beaucoup. Vers 16 ans, j’ai dû quitter le foyer familial. La musique est devenue ma bouée de sauvetage. Ça m’a permis de rêver à un avenir meilleur, ça me tenait debout, la tête hors de l’eau. Elle a pris beaucoup de place dans ma vie à partir de ce moment.
Un de tes artistes préférés t’a adoubé, Stromae, qu’est-ce que ça a représenté pour toi ?
Je l’ai découvert à la télé, lorsque je vivais à Molenbeek (Belgique). J’ai regardé ses concerts sur YouTube car je n’avais pas les moyens d’y aller. J’admirais sa précision, la maîtrise de son art. Sa vision et sa carrière m’ont passionnée plus que sa musique. Que cet artiste ait écouté mon son, c’est une folie, un bug dans la matrice.
Dans ton EP, tu parles beaucoup de toi, est-ce que ça fait peur ou c’est libérateur ?
Au début, je pensais avoir beaucoup parlé de moi, mais après le morceau « Encore », j’ai réalisé qu’en réalité ce n’était pas assez. J’ai donné avec pudeur, on sent l’histoire, mais on ne sait pas tout. Pour le prochain projet, je suis prête à me livrer plus, mais exposer mes histoires intimes fait peur. C’est le jeu.
On doit s’attendre à quoi pour la suite ?
Je pense que mon prochain projet va écraser le premier. J’ai bien évolué, on comprendra mieux qui je suis et d’où je viens.
Dernière question, tu es au Château de Crémat – Nice (06) pour la Rentrée Littéraire Fnac 2025, qu’est-ce que ça représente pour toi ?
Je ne suis pas une mordue de littérature. J’aime bien mais je ne suis pas avertie de ce milieu. C’est aussi cette curiosité qui m’a fait venir. J’ai hâte de voir comment ça va se passer avec ce public, avec lequel je ne suis pas familier.
Maxime Martinez
📸 Camille Yembe par Kwabena Sekyi Appiah.










