Le 25/05/19 à l’Opéra – Nice (06)
#NVmagLiveReport
Une soirée de duos. En début de programme, au piano Jean-Yves Candela, au violon François Arnaud. Des habitués des scènes azuréennes dans un répertoire classique, pour eux, et donc qui fleurent bon le swing. En hommage à Didier Lockwood, il entame leur set par “Les Valseuses“, un thème de Grappelli, qu’il affectionnait beaucoup. Pizzicati, piano qui balance, on est dans l’ambiance…Ils ne peuvent enchaîner que sur un standard encore plus connu, du Walt Disney, une compo de Churchill… Frank. “Someday My Prince Will Come“, du velours. Le violon cela se joue tzigane disait Bobby Lapointe, François Arnaud confirme dans le titre suivant, un medley du concerto d’Aranjuez et du Spain de Chick Corea. Quelques “Nuages” à la Django avant de faire, en trois temps, un “Besame Mucho” fort peu latino et de laisser le public se diriger vers la buvette.
La sonnerie retentit, tout le monde regagne sa place, les trois balcons sont désormais plein. Frederica Randrianome présente le duo que tout le monde attend Cécile McLorin Salvant et son pianiste Sullivan Fortner.
Piano-voix façon récital mais avec un Sullivan Fortner natif de La Nouvelle Orléans ça va swinguer. Comme nous sommes à l’opéra de Nice, Miss McLorin Salvant commence son concert avec l’extrait d’un opéra de Kurt Weill fort bien venu pour se chauffer la voix et surprendre l’auditoire qui s’attendait à quelque chose de plus jazz. D’autant qu’elle enchaîne sur une chanson réaliste en français avant de passer à l’anglais et de laisser Fortner s’amuser un peu sur le clavier du Steinway. Les doigts courent sur les touches noires et blanches, les pieds commencent à marquer le rythme sur le sol, les corps à chalouper sur les fauteuils rouges. Retour au français avec une version somptueuse de “La Solitude” de Barbara avant de puiser, elle aussi, dans Disney, un extrait de la musique de Cendrillon. Plus tard, une reprise de Charles Trenet qui s’y connaissait bien en jazz, “Une étoile m’a dit” où le facétieux pianiste lui fera prendre un fou rire entre deux couplets. Un grand moment d’émotion, quelques temps plus tard avec son interprétation poignante de “Litanies pour un retour” de Brel (Mon cœur, ma mie, mon âme…). Elle revient à un jazz plus roots, presque dansant et une de ses nouvelles compositions pas encore enregistrée “Moon Song“. Pour finir le set, un vieux blues de Big Bill Bronzy sur la condition des noirs aux Etats-Unis, ” Black, Brown and White” (If you was white, You’s alright, If you was brown, Stick around, But if you’s black, oh, brother, Get back, get back, get back). Elle le chante avec une belle énergie puis quitte la scène. Elle revient avec un bouquet de roses rouges offert par Frederica et chante a cappella, sans micro une chanson, surement d’origine irlandaise, narrant l’histoire tragique d’un certain John Henry.
Magnifique duo, une belle complicité, du rire et de l’émotion. Et cette voix qui va chercher loin sans jamais forcer, juste la note qu’il faut avec ce petit plus qui fait les grandes interprètes. L’opéra de Nice est un bel écrin pour une telle chanteuse.
Jacques Lerognon